jeudi 26 janvier 2012

PAROLE SUR LA MORT 9







CHAPITRE IX : L’UTILITE DE LA PENSEE PERMANENTE DE LA MORT.



Ce texte est proposé aux chrétiens orthodoxes qui fréquentent régulièrement les offices de l'Eglise ainsi que les sacrements, qui ont une vie de prière intérieure et qui ont un père spirituel chez qui ils se confessent régulièrement. Pour les autres, nous craignons qu'il provoquera chez eux des réactions négatives et pourraient être peturbés dans leur psyché.


Il pourrait-y avoir des passages difficiles qui, probablement, vont heurter la sensibilité de notre entendement humain. Prière de garder à la mémoire la pensée que Christ est venu sauver ceux qui espèrent en Lui, que la vie a jailli du tombeau et le Seigneur nous l'a accordée par le Saint baptême et les sacrements de l'Eglise.






Le troupeau raisonnable des véritables chrétiens est petit et humble. Il est méprisé et persécuté par les fils orgueilleux de ce monde. Le Seigneur lui commande de ne pas faiblir dans les tribulations, de ne pas les craindre, de ne leur prêter aucune attention, et de se diriger vers le Royaume Céleste promis par la bienveillance de Dieu le Père. Il commande de transformer tous les biens terrestres en aumônes, c'est-à-dire en biens célestes, afin que le trésor même de l'homme, se trouvant au ciel, l'attire là-haut. Il ordonne d'organiser la vie de manière à être toujours prêt à la mort. Qualifiant de nuit la vie sur terre, Il rappelle qu'on ignore à quelle garde de cette nuit la mort viendra, pendant l'enfance, la jeunesse, l'âge mûr ou encore dans l'extrême vieillesse. Le Seigneur menace de mort soudaine celui qui, croyant la fin très éloignée, se permet d'abuser de la vie terrestre et des dons de Dieu.
Les véritables disciples du Christ accomplissent les commandements avec exactitude. L'Apôtre Paul dit de lui-même qu'il est chaque jour à la mort (1Cor.15,31). Celui qui est prêt chaque jour à mourir est chaque jour à la mort. Celui qui dédaigne tous les péchés et le désir même du péché, celui dont la pensée s'est transportée au ciel et y demeure, celui-là est chaque jour à la mort. Celui qui est chaque jour à la mort vit déjà d'une vie éternelle, véritable. (Cf -Saint Macaire le Grand)
« Bien peu de chrétiens, même parmi ceux qui vivent dans les saints monastères, atteignent une telle vie, et parviennent à garder leur pensée au ciel, se transférant quotidiennement dans l'éternité, alors que leur corps vit sur la terre. Toutefois, cet état spirituel est accessible aux chrétiens qui vivent dans le monde. Les soucis terrestres poussent les pensées vers le terrestre, attachent l'homme au temporel et au corruptible, lui ravissent le souvenir de l'éternité. Mais ceci ne doit pas abattre le chrétien. S'il ne peut pas demeurer constamment dans le domaine de l'éternel et du spirituel, il peut au moins se tourner vers lui fréquemment, et se préparer à la mort en se gardant de toute action, parole ou pensée interdite par les commandements du Christ. Il peut s'y préparer par une confession quotidienne (ou en tout cas aussi fréquente que possible) de ses péchés devant son père spirituel, et dans sa chambre intérieure devant Dieu, le seul scrutateur des cœurs. Il peut s'y préparer en s'abstenant des mets et des boissons, des bavardages, des plaisanteries, des rires, des distractions, des réjouissances et des jeux, du luxe exigé par la vanité de ce monde et de toute chose superflue qui rend la pensée de la mort étrangère à l'esprit, et qui présente la vie terrestre comme éternelle. Il peut s'y préparer par des prières venant d'un cœur broyé et humilié, par des larmes, des soupirs, des sanglots. Il peut s'y préparer par des aumônes abondantes, l'oubli des offenses, l'amour pour les ennemis, les bienfaits, la patience dans les tribulations et les tentations terrestres, par lesquelles sont rachetées les tribulations éternelles de l'enfer. Si la mort trouve le chrétien dans cet état spirituel, alors il sera ceint, prêt à accomplir le long parcours de la terre vers le ciel avec une lampe allumée, c'est-à-dire la raison et le comportement éclairés par la Vérité Divine.
Un des moyens de se préparer à la mort est de s’en souvenir et d'y réfléchir. Il est évident par les paroles du Seigneur citées plus haut qu'il s'agit d'un commandement du Seigneur. Souviens-toi de ta fin et tu ne pécheras jamais (Sirah7,36). Les saints moines cultivent avec le plus grand soin cet aspect de leur exploit spirituel. Chez eux, la réflexion sur la mort, couverte par l'ombre de la grâce, se transforme en une contemplation vivante du mystère de la mort, accompagnée d'une prière fervente, de larmes abondantes et de profonds gémissements du cœur. Sans un permanent souvenir de la mort et du jugement de Dieu, ils considèrent comme dangereux le plus haut exploit ascétique, qui pourrait conduire à la présomption.
Saint Antoine le Grand recommande à ses disciples de méditer sur la mort : « En examinant les incertitudes qui pèsent sur la vie humaine et l'obscurité qui entoure sa fin, nous nous éloignons du péché. Quand nous nous levons du sommeil, nous ignorons si nous atteindrons le soir. Quand nous nous apprêtons à accorder du repos à notre corps, nous ne savons pas plus si nous verrons la lumière du jour qui suit. En méditant ainsi sur notre vie incertaine et sur notre nature fragile, nous en arrivons à reconnaître que c'est la providence divine qui nous gouverne. C'est alors que nous cessons de pécher et de nous laisser entraîner par les circonstances vaines et corruptibles, de nous fâcher contre autrui, d'amasser des trésors terrestres. Nous dédaignons tout ce qui est corruptible par crainte du départ d'ici-bas qui peut survenir à tout moment, et par une constante réflexion sur la séparation de notre âme d'avec notre corps. Alors cesse l'amour pour le sexe féminin, le feu de l'adultère s'éteint, nous nous pardonnons mutuellement nos offenses, gardant en permanence sous les yeux la rétribution définitive. La peur du jugement et la crainte des souffrances anéantissent les trompeuses convoitises de la chair et l'âme se sent alors soutenue si elle incline vers la chute ».
Saint Isaac le Syrien dit: « Qui est digne d'être appelé raisonnable ? Celui qui, en comprenant que cette vie a un terme, peut mettre fin à ses péchés. La première pensée que Dieu envoie par amour pour l'homme, c'est la pensée du départ ; elle tombe dans son cœur et conduit l'âme vers la vie éternelle. Cette pensée est suivie tout naturellement du mépris du monde. Elle est le principe de tout bon mouvement qui instruit l'homme dans la connaissance de la vie. La puissance divine, qui cherche à aider l'homme en lui manifestant la vie, dépose en lui cette pensée comme fondement, comme nous l'avons dit. Si l'homme ne l'éteint pas par les soucis du monde et les vaines conversations, mais la cultive au contraire dans l'hésychia, en se concentrant sur lui-même, alors elle le conduira vers une vision profonde que la parole ne peut exprimer. Satan hait par-dessus tout cette pensée, et il met tout sa force à l'extirper de l'homme. Si cela était possible, il lui donnerait les royaumes du monde entier, uniquement pour le distraire de cette pensée. C'est avec plaisir qu'il le ferait ! Comme c'est insidieux ! Il sait que si la pensée de la mort s'enracine dans l'homme, son esprit quitte le pays du leurre et les ruses démoniaques ne s'approchent plus de lui. Ne croyez pas que nous parlons ici de la première pensée qui réveille en nous le souvenir de la mort : nous parlons de la chose dans toute son ampleur, qui a lieu lorsque le souvenir et la méditation de la mort nous affermissent et nous étonnent en permanence. La première pensée est charnelle, la seconde est une vision spirituelle et une grâce merveilleuse. Cette vision est revêtue de pensées lumineuses. Celui qui l'expérimente ne prête aucune attention au monde et ne se préoccupe pas de son corps (...) Quand tu t'approches de ta couche, dis-lui: ô, ma couche ! Ne deviendras-tu pas cette nuit mon cercueil? N'est-ce pas le sommeil éternel au lieu du sommeil temporel qui viendra vers moi ? Tant que tu as des jambes, cours vers l'action, avant qu'elles ne soient liées par des liens qu'on ne peut détacher Tant que tu as des doigts, étends-les pour la prière avant que la mort n'arrive ! Tant que tu as des yeux, remplis-les de larmes avant que la terre ne les recouvre ! La rose se fane dès que le vent souffle sur elle, et toi, tu meurs dès qu'un de tes organes est ébranlé. Ô, homme! Enracine dans ton cœur la pensée de ton départ et dis-toi constamment : le messager qui vient me chercher est à la porte. Pourquoi suis-je assis ? Le départ pour l'éternité est sans retour ».
Dans le sixième degré de l'Echelle Sainte, Saint Jean Climaque dit : « Comme le pain est le plus nécessaire de tous les aliments, la pensée de la mort est le plus nécessaire de tous les exercices. Le souvenir de la mort incite ceux qui vivent en communauté à s'appliquer aux labeurs, aux mortifications, et surtout aux humiliations. A ceux qui vivent loin du bruit, il procure le rejet de toute préoccupation, la prière continuelle et la garde de l'intellect. Mais ces trois choses sont à la fois les mères et les filles de la pensée de la mort. La pensée intense de la mort conduit à restreindre la nourriture et, quand la nourriture est restreinte avec humilité, les passions sont également retranchées. Les pères déclarent que l'amour parfait est exempt de toute chute; de même, je puis assurer que la parfaite conscience de la mort est exempte de toute crainte. On dit que la mer est insondable et on rappelle abîme sans fond. De même, la pensée de la mort amène la pureté et l'activité de l'âme à un état d'incorruptibilité. Il est impossible, tout à fait impossible de passer le jour présent dans la piété si nous ne le considérons pas comme le dernier de notre vie. Soyons pleinement assurés que la pensée de la mort est un don de Dieu qui vient s'ajouter à tous Ses autres bienfaits. Sinon, comment expliquer que nous restions souvent sans larmes et secs auprès des tombeaux, alors qu'il nous arrive souvent d'être touchés de componction loin de cette contemplation ? »
Barsanuphe le Grand affirme que l'homme qui retranche en tout sa volonté, en gardant le cœur humble et la mort constamment devant les yeux peut être sauvé par la grâce de Dieu. Où qu'il soit, la crainte ne s'emparera pas de lui. Une telle personne, oubliant ce qui est en arrière, se porte vers ce qui est en avant (Phil.3,13). « Que le souvenir de la venue de la mort dont l'heure n'est connue par aucun homme fortifie ta pensée. Efforçons-nous de faire le bien avant de partir de cette vie ! Nous ignorons quel jour nous serons appelés. Pourvu que nous ne demeurions pas sans préparation et ne nous retrouvions pas en dehors de la salle des noces avec les cinq vierges folles qui avaient pris leur lampe sans y avoir mis de l'huile ! ». « Comprends que le temps ne tarde pas et que lorsque l'heure arrive, le messager de la mort est impitoyable ! Qui se serait fait entendre de lui après l'avoir imploré ? Il est le vrai serviteur du véritable Maître dont il accomplit les ordres avec exactitude. Craignons ce jour et cette heure terrible où ne pourront nous défendre ni un frère, ni un parent, ni les autorités, ni le pouvoir, ni la richesse, ni la gloire. Seuls l'homme et son œuvre seront présents ». « Il est bon pour l'homme de se souvenir de la mort afin de bien savoir qu'il est mortel. Le mortel n'est pas éternel, il abandonnera obligatoirement ce siècle. Par le souvenir incessant de la mort, l'homme commence à faire le bien volontairement ».
Saint Philothée du Sinaï conseille à l'athlète du Christ de passer toute la matinée dans une longue prière vigilante puis, après avoir s'être quelque peu substanté de consacrer un certain temps au souvenir et à la réflexion sur la mort. Citant ce père, Saint Nil de la Sora recommande également de passer le temps qui Suit le repas à réfléchir sur la mort et le Jugement. L'enseignement des pères, issu de leur bienheureuse expérience, est utile et nécessaire pour tous ceux qui désirent se libérer de ce trompeur et séduisant état dans lequel l'homme croit qu'il est éternel sur la terre, et que la mort concerne seulement les autres. Quand l'athlète du Christ s'est quelque peu exercé au souvenir de la mort, le Seigneur miséricordieux lui envoie un sentiment vivant de la mort et lui vient en aide dans sa prière. Il l'entraîne par avance au terrible jugement du Christ et l'homme se met à supplier le Seigneur ami des hommes pour le pardon de ses péchés, pardon qu'il reçoit. C'est pourquoi Saint Jean Climaque dit : « la prière est la cour de justice, la salle du jugement et le tribunal du Seigneur avant le jugement futur » (28,1).
Saint Philothée du Sinaï témoigne du fait que la pensée de la mort (c'est ainsi que les pères qualifient le souvenir et la méditation sur la mort) purifie l'esprit et le corps : « Captivé en esprit et non par la vue, je voulais l'acquérir comme compagne pour toute la durée, de cette vie terrestre, étant devenu admirateur de sa beauté et de sa grandeur. Comme elle est humble, joyeusement triste, prudente ! Comme elle craint constamment la future et juste épreuve ! Comme elle craint de remettre jour après jour la vie vertueuse I Elle répand sur les yeux charnels une eau vivifiante et salutaire, et sur les yeux de l'âme une source d'où jaillissent les pensées les plus sages qui bondissent et régénèrent le jugement. Cette fille d'Adam, la pensée de la mort, comme j'avais soif de l'avoir comme compagne, de m'endormir avec elle, de m'entretenir avec elle pour explorer ce qui adviendra de moi après m'être séparé de mon corps I » « La pensée de la mort constante et vivante donne naissance à des pleurs unis à la joie et à la douceur, ainsi qu'à la vigilance de l'intellect ».
Saint Philothée dit encore : « Celui qui sait racheter sa vie avec sagesse, qui demeure constamment dans le souvenir de la mort, y réfléchissant sans trêve, et détournant ainsi avec grande
sagesse son esprit des passions, celui-là voit plus clairement la venue des pensées démoniaques que celui qui veut passer sa vie hors de la pensée de la mort et purifier son cœur par la raison seule, sans garder sa pensée par les pleurs et la tristesse. Celui qui prétend vaincre toutes les passions pernicieuses par l'ingéniosité de son intellect est lié sans le savoir par la pire d'entre elles et s'éloigne souvent de Dieu par la présomption. Cet homme doit être rigoureusement attentif à lui-même afin de ne pas s'enorgueillir et perdre la raison. ll est habituel aux âmes qui amassent des connaissances ici et là de se prévaloir devant ceux qui leur semblent être les plus petits. Il n'y a pas en eux la moindre étincelle d'amour instructif, me semble-t-il. Au contraire, celui qui possède la pensée de la mort voit plus clairement que les autres l'invasion des démons, et les chasse ».
Le même dit encore: « En vérité, la pensée vivante de la mort abrite en elle de nombreuses vertus : elle est la mère des pleurs, elle incite à s'abstenir de tout, elle est le souvenir de la géhenne, la mère de la prière et des larmes, elle anéantit la passion pour le corruptible en montrant sa précarité, elle est la source de l'ingéniosité unie à la sagesse. Leurs enfants sont la crainte de Dieu, la purification du cœur des pensées passionnelles, la mise en pratique des commandements ».
Saint Hésychius de Jérusalem considère le souvenir continuel de la mort comme un type particulier de vigilance. Il le compare au gardien des portes de l'âme qui empêche l'entrée des pensées malignes. Il dit qu'il faut si possible se souvenir constamment de la mort. Un tel souvenir conduit à déposer soucis et vanités, et engendre la garde de l'intellect et la prière incessante (homélie sur la vigilance).
Le souvenir permanent de la mort est une grâce merveilleuse, l'apanage des saints, et tout particulièrement de ceux qui se sont adonnés à un repentir scrupuleux lié à une hésychia inaltérable. Ce n'est que dans l'hésychia que mûrissent et fleurissent les plus hautes vertus, de même qu'il faut des serres pour cultiver les plantes les plus rares et les plus précieuses. Nous aussi, faibles et passionnels, nous devons nous forcer à nous souvenir de la mort, contraindre nos cœurs à y penser, même si une telle réflexion répugne à ceux qui aiment le péché et le monde. Pour mener à bien cet effort, les saints pères recommandent de se fixer chaque jour une heure précise, exempte de tout soucis, pour la consacrer au souvenir effrayant et salutaire de l'inévitable mort. Même si mourir est inévitable pour chaque homme, les débuts de cette ascèse sont difficiles et on peine pour n'obtenir qu'un froid souvenir de la mort (ce qui atteste au passage notre état de chute). La constante distraction des pensées et le ténébreux oubli ravissent perpétuellement le souvenir de la mort chez ceux qui se livrent à cet exercice. Plus tard, d'autres actions contraires font leur apparition : des affaires urgentes et des préoccupations surviennent justement à l'heure que nous avions fixée pour nous soucier de la vie éternelle, afin de nous voler cette heure et de nous dérober petit à petit le souvenir même de cette pratique des plus salutaires. Mais si nous comprenons l'astuce des pouvoirs aériens, si nous nous astreignons à cette ascèse, alors nous observerons en nous un autre combat : les pensées de doute sur l'efficacité et l'utilité de notre effort, des pensées de blasphème et de moquerie cherchant à le rendre étrange, stupide, risible, des pensées de fausse humilité qui nous suggèrent de nous démarquer des autres hommes dans notre comportement. Si, par la grande miséricorde de Dieu, nous sortons vainqueurs de ce combat, la crainte produite par le souvenir de la mort s'avérera extrêmement pénible pour notre « vieil homme », car elle nous montrera concrètement notre mort. L'esprit et l'imagination seront terrorisés. Un tremblement glacial traversera le corps, le secouera, l'affaiblira. Le cœur ressentira une insupportable angoisse mêlée de désespoir. Il ne faut pas rejeter cet état ni en redouter d'éventuelles conséquences pernicieuses. Saint Syméon le Nouveau Théologien dit : « Pour celui qui commence une vie en Dieu, la crainte des souffrances et les douleurs qu'elle fait naître sont utiles. Celui qui rêve de débuter son ascèse sans une telle douleur et sans entraves, non seulement bâtit son effort sur le sable, mais ressemble à celui qui veut bâtir dans l'air, sans fondation, ce qui est impossible. De cette douleur naît bientôt une joie plurielle; Par ces entraves sont déchirés les liens de tous les péchés et de toutes les passions. Le tyran devient la cause non de la mort mais de la vie éternelle. Celui qui acceptera la douleur qui naît de la crainte des souffrances éternelles, plutôt que de s'enfuir, s'en remettra à elle dans la volonté de son cœur et en assumera les liens. Il avancera plus vite et elle le présentera au Roi des rois. Quand cela sera accompli, l'athlète verra en partie la gloire de Dieu, ses liens seront immédiatement défaits, la crainte douloureuse s'éloignera, la douleur du cœur se transformera en joie, une source naîtra qui répandra des larmes sensibles coulant sans discontinuer comme une rivière. Dans l'âme apparaîtront le calme, la mansuétude, une douleur indicible, le courage qui tend librement et sans entraves vers l'obéissance aux commandements de Dieu ».
Il est clair qu'un tel changement se produit dans le cœur par la grâce d'un espoir de salut. Alors, dans cette réflexion sur la mort, la joie se mêle à la tristesse, les larmes amères s'adoucissent. L'homme qui pleurait en se souvenant de la mort comme d'un châtiment pleure maintenant en la voyant comme un retour à une inestimable patrie. Tel est le fruit de la pensée de la mort. Ayant compris l'importance de ce fruit, il faut avoir le courage de le cultiver et de surmonter les obstacles par un effort raisonnable et constant. Il faut croire que ce fruit sera donné en temps voulu par la grâce et la miséricorde de Dieu. Le souvenir de la mort et des craintes qui l'accompagnent et la suivent, uni à une prière fervente et aux pleurs sur soi-même, peut remplacer tous les exploits spirituels, embrasser toute la vie de l'homme, lui procurer la pureté du cœur, attirer en lui la grâce de l'Esprit Saint, et lui accorder la libre ascension vers le ciel, en évitant les pouvoirs aériens.
Avant d'atteindre ce bienheureux état de prière, avant que l'intellect ne contemple le trépas à venir et ne craigne la mort comme la créature doit craindre la menace accompagnant le commandement du Créateur, il est utile de susciter en soi-même le souvenir de la mort en visitant les cimetières et les malades, en assistant au décès ou à l'inhumation de ses proches. Il est bon d'examiner et de se remémorer fréquemment les morts récentes auxquelles nous avons assisté. Combien de nos connaissances qui aimaient cette vie terrestre et en goûtaient la prospérité, qui souhaitaient vivre longtemps, qui n'étaient nullement âgées, ont été brusquement fauchées par la mort ! Aucune d'elles n'a pu dire à la mort: Attends ! Eloigne-toi Je ne veux pas encore mourir !». Certains n'eurent même pas le temps de prendre des dispositions, ils furent ravis au milieu d'un joyeux festin, d'un repas somptueux. D'autres moururent en route ou se noyèrent, se donnèrent la mort ou furent tués. Quelques uns furent dévorés par des bêtes, d'autres se mirent au lit pour accorder à leur corps un bref repos et s'endormirent du sommeil éternel. Regardons autour de nous. Combien de proches, d'amis ou de connaissances quittèrent-notre société, pris par la mort ! Les gens célèbres laissèrent la gloire, le pouvoir et les honneurs, les riches abandonnèrent l'argent et les biens amassés avec peine et gardés avec grande parcimonie. La mort sépare les parents de leur famille, l'époux de l'épouse, l'ami de son ami. Elle frappe le génie dans ses grandes entreprises, elle prive la société de son membre le plus utile à un moment où elle en avait le plus besoin. Personne ne peut l'arrêter ou lui résister, personne ne peut lui demander des comptes sur ses desseins si inconciliables avec la raison humaine. Qu'est-ce qui n'est pas vain sur la terre. Qu'est-ce qui n'est pas instable, qu'est-ce qui a une quelconque constance ? En vérité, seule la vie en Christ se prolonge au-delà des frontières de la tombe et trouve son épanouissement et sa beauté lumineuse après la mort du corps. Tout le reste est plus faible que l'ombre, trompeur comme les rêves... Par la corruption la mort détruit en une heure, en un instant les travaux de toute une vie (Cf. la 7ème homélie de Saint Nil de la Sora)..
La mort soudaine ne frappe que ceux qui négligent leur salut. Ceci est annoncé par le Seigneur Lui-même (Luc12,46). « Dieu, dit Saint Barsanuphe le Grand à un moine qui redoutait une mort soudaine et prématurée, ne prendra pas l'âme de l'ascète qui combat les passions sans l'avoir d'abord conduit jusqu'au niveau de l'homme parfait ».
Ayant compris la brièveté de notre vie, la vanité des biens terrestres et des honneurs, ayant perçu l'avenir terrible de ceux qui ont dédaigné le Rédempteur et la Rédemption en s'offrant entièrement au péché et à la corruption, détournons les yeux de notre âme de la vision trompeuse et séduisante des beautés du monde, qui attirent les faibles cœurs humains dans leurs filets ! Contemplons le terrible et salutaire spectacle de la mort qui nous guette ! Pleurons d'avance sur nous-mêmes ! Lavons et purifions par les larmes et la confession les péchés inscrits dans les livres du prince de ce monde ! Acquerrons le sceau de la grâce de l'Esprit Saint, signe d'élection et de salut, indispensable pour cheminer sereinement dans les airs et pour accéder aux demeures célestes ! Employons la richesse injuste, comme dit l'Evangile, c'est-à-dire les richesses terrestres, à acquérir des trésors célestes par une distribution abondante d'aumônes. Employons ce grand don de Dieu qu'est notre vie terrestre à accomplir le dessein du Seigneur : la recherche de la connaissance de soi-même et de Dieu, et la préparation de notre destin éternel ! Ne perdons pas notre temps, employons-le efficacement ! Il ne nous sera pas accordé une seconde fois. Sa perte est irremplaçable. Nous sommes des exilés du Paradis ! Ce n'est pas pour des réjouissances, des solennités, ou des jeux que nous nous trouvons sur terre, mais pour tuer la mort qui nous a tués et, par la foi, le repentir et la croix, reconquérir le Paradis perdu.
Que le Seigneur miséricordieux accorde aux lecteurs de cette homélie et à son auteur le souvenir de la mort pendant leur vie terrestre ! Par la pensée de la mort et le renoncement à tout ce qui est vain, par une vie tendue vers l'éternité, qu'Il éloigne de nous, une fois l'heure venue, la férocité de la mort; que celle-ci nous fasse pénétrer dans une vie bienheureuse, éternelle et véritable ! Amen. (fin)

mercredi 25 janvier 2012

PAROLE SUR LA MORT 8

CHAPITRE VIII : LE PECHE MORTEL, CELUI QUI NE L’EST PAS ET LES PASSIONS QUI DETRUISENT L’HOMME.



Ce texte est proposé aux chrétiens orthodoxes qui fréquentent régulièrement les offices de l'Eglise ainsi que les sacrements, qui ont une vie de prière intérieure et qui ont un père spirituel chez qui ils se confessent régulièrement. Pour les autres, nous craignons qu'il provoquera chez eux des réactions négatives et pourraient être peturbés dans leur psyché.

Il pourrait-y avoir des passages difficiles qui, probablement, vont heurter la sensibilité de notre entendement humain. Prière de garder à la mémoire la pensée que Christ est venu sauver ceux qui espèrent en Lui, que la vie a jailli du tombeau et le Seigneur nous l'a accordée par le Saint baptême et les sacrements de l'Eglise.




On a dit plus haut que le péché mortel du chrétien orthodoxe non guéri par un repentir convenable l'expose à des souffrances éternelles. Il a été dit aussi que les païens, les musulmans, les adeptes de religions erronées, représentent dès à présent l'héritage de l'enfer et sont privés de tout espoir de salut, puisqu'ils ne considèrent pas le Christ comme l'unique moyen de salut. Les péchés mortels du chrétien sont les suivants : l'hérésie, le sectarisme, le blasphème, le reniement, la magie, le désespoir, le suicide, la fornication, l'adultère, les péchés de la chair contraires à la nature, l'inceste, l'ivrognerie, le sacrilège, le meurtre, le pillage, le vol, les offenses pénibles et inhumaines. Parmi tous ces péchés, seul le suicide ne peut pas être guéri par le repentir. Chacun d'eux met l'âme à mort et la rend inapte à acquérir la béatitude éternelle tant qu'elle ne s'est pas purifiée par un repentir satisfaisant. Si l'homme chute ne serait-ce qu'une fois dans un seul de ces péchés, son âme meurt : quiconque observe toute la loi mais pèche contre un seul commandement devient coupable de tous. En effet, Celui qui a di : tu ne commettras point d'adultère, a dit aussi: tu ne tueras point. Or si tu ne commets point d'adultère mais que tu commets un meurtre, tu deviens transgresser de la loi (Jac:2,1011).
Que celui qui a commis un péché mortel ne tombe pas dans le désespoir! Qu'il se guérisse par le repentir auquel il est appelé jusqu'à la dernière minute de sa vie par le Seigneur qui a dit dans le Saint Evangile: celui qui croit en Moi vivra, quand bien même il serait mort! (Jn.11,25) Cependant, c'est un malheur de demeurer dans un péché mortel, surtout quand ce péché devient une habitude. Aucune bonne œuvre ne peut racheter de l'enfer l'âme qui se sépare du corps sans s'être purifiée au préalable de ce péché mortel. Pendant le règne de l'empereur Léon, vivait à Constantinople un homme riche et très célèbre qui distribuait d'abondantes aumônes aux pauvres. Malheureusement, il se livrait à l'adultère, et il s'y livra jusqu'à sa vieillesse car avec le temps, cette méchante habitude s'était enracinée en lui. Tout en continuant à distribuer des aumônes, il n'en renonçait pas pour autant à l'adultère, et soudain, il mourut. Le Patriarche Gennade discuta beaucoup avec d'autres évêques de son destin éternel. Les uns disaient qu'il était sauvé, en citant les paroles de l'Ecriture : La richesse d'un homme sert de rançon pour sa vie (Prov.13,8).D'autres disaient qu'un serviteur de Dieu doit être irréprochable et sans péché parce qu'il est écrit : quiconque observe la loi, mais pèche contre un seul commandement, devient coupable de tous (Jc.2,10) et aussi : Je vous jugerai chacun selon ses voies (Ez.33,20) et toute sa justice sera oubliée (Ez.33,13). Le patriarche donna l'ordre à tous les Moines et reclus de demander à Dieu de révéler le destin du défunt. Dieu le révéla effectivement à un reclus qui invita le patriarche chez lui et raconta devant tous : «La nuit dernière, j'étais en prière. Je vis un certain lieu : à sa droite duquel se trouvaient le Paradis et ses biens ineffables et à sa gauche un lac de feu dont les flammes atteignaient les nuages. Entre les deux se tenait le défunt, lié et gémissant terriblement. Il jetait de fréquents regards sur le Paradis. Je vis un ange s'approcher de lui et lui dire : homme Pourquoi gémir en vain ? Pour ta miséricorde tu évites les souffrances, mais pour n'avoir pas mis un terme à tes mauvais actes de fornication, tu es privé du bienheureux paradis ! ». Le patriarche et ses proches, entendant cela, furent saisis de crainte et dirent : l'Apôtre Paul a dit la vérité: Fuyez l'impudicité; quelqu'autre péché que l'homme commet est extérieur au corps. Mais celui qui se livre à l'impudicité pèche contre son propre corps (1Cor.6,18). Où sont ceux qui disent que s'ils tombent dans le péché d'adultère, ils seront sauvés par leurs aumônes ? Si l'homme est vraiment miséricordieux, il doit l'être pour lui-même et acquérir la pureté du corps sans laquelle personne ne verra Dieu. L'argent distribué par une main impure et une âme impénitente n'est d'aucune utilité.
Les chrétiens orthodoxes qui ont entretenu Une passion coupable sont privés du salut pour être entré en communication avec satan et avoir rompu la communion avec Dieu. Les passions sont les habitudes pécheresses de l'âme qui, avec le temps et l'habitude, se sont transformées en caractéristiques naturelles. Ces passions sont la gloutonnerie, l'ivrognerie, la volupté, la vie dissipée dans l'oubli de Dieu, la rancune, la cruauté, l'amour de l'argent, l'avarice, l'acédie, la paresse, l'hypocrisie, le mensonge, le vol, la présomption, l'orgueil et toutes les choses semblables. Chacune de ces passions, lorsqu'elle s'est transformée en une règle de vie, rend l'homme inapte à la jouissance spirituelle sur terre et au ciel, même si aucun péché mortel n'a été commis. Le Saint Apôtre Paul dit : Ne vous y trompez point, ni les impudiques, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les dépravés, ni les gens de mœurs infâmes, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, les insulteurs ou les rapaces n'hériteront du Royaume des Cieux (1Cor.6,9-10). Or les œuvres de la chair manifestes sont: la fornication, l'impureté, la débauche, l'idolâtrie, la magie, l'inimitié, la discorde, la jalousie, la fureur, le fait de s'enflammer, les tentations, l'hérésie, l'envie, les meurtres, les cris indécents et les choses semblables. Je vous préviens, comme je l'ai déjà fait, que ceux qui font de telles choses n'hériteront point du Royaume des Cieux. Ceux qui sont au Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises (Ga1.5,19-21&24).
Une passion exige d'être combattue méthodiquement par le repentir jusqu'à être déracinée en temps utile par la vertu contraire. Une passion ne se manifeste pas toujours par des actes. Elle peut vivre secrètement dans le cœur de l'homme, emprisonnant ses sentiments et ses pensées. La passion se reconnaît à ce que l'homme ne cesse d'imaginer le péché et de jouir de lui au cours de rêveries. Captivé par le péché, il n'a plus la force de résister à la puissance attirante des pensées et des images qui, par leur douceur mauvaise, engloutissent sa sagesse et sa fermeté. Le passionné ne cesse de commettre le péché en rêveries. Il maintient la communion avec les esprits ténébreux par les sentiments de son cœur et se soumet à ces esprits, ce qui aura pour conséquence sa perdition éternelle. Le Seigneur ordonne à son prophète: Crie à pleine gorge, ne te retiens pas ! Annonce à mon peuple ses péchés et à la maison de Jacob ses iniquités ! Tous les jours ils me cherchent et veulent connaître mes voies, comme une nation qui aurait pratiqué la justice et n'aurait pas abandonné la voie de son Dieu. Ils me demandent à présent un jugement équitable et désirent s'approcher du Seigneur en disant: que nous sert le jeûne si Tu ne le vois pas, de mortifier notre âme si Tu ne le vois pas ? Car c'est le jour de votre jeûne que vous accomplissez vos volontés (Is.58,1-3), c'est-à-dire vos pensées malignes ! Vous leur offrez des holocaustes comme à des idoles ! Vous assimilez vos pensées méchantes à des dieux auxquels vous offrez le plus grand de tous les sacrifices, celui de votre liberté, qu'il vous appartient de Me consacrer par vos bonnes actions et votre conscience pure (Cf homélie 53 de•Saint Isaac le Syrien).
L'espoir du salut ne couvre l'homme de son ombre que s'il est un vainqueur permanent dans le combat invisible. Cette pensée fut exprimée par le saint prophète David qui a dit: En cela j'ai connu que Tu m'as aimé, que l'ennemi ne s'est par réjoui à mon sujet (Ps.40,12). Pour parvenir à cet état bienheureux il priait en disant: de ceux qui sont cachés en moi, purifie-moi, et de ceux qui me sont étrangers, préserve Ton serviteur (Ps.18,13) (Cf Saint Macaire le Grand). S'ils ne l'emportent pas sur moi, alors je serai sans reproche et pur du grand péché (Ps.18,14). Rends-moi la joie de Ton salut et fortifie-moi par l'Esprit Souverain (Ps.50,13). Alors des paroles de ma bouche Te seront agréables et la méditation de mon cœur sera sans cesse devant Toi, Seigneur, mon Aide et mon Rédempteur (Ps.18,15). Il est clair que le grand péché caché dont parle David n'est autre que la passion. Il l'a appelée péché étranger car elle est faite de pensées démoniaques acceptées et adoptées par l'âme. Ces pensées sont bien étrangères à l'âme, elles la font souffrir, la rendent malade et la plongent dans un état contraire, à la nature. La pureté digne du Paradis apparaît quand toutes les passions ont été éradiquées du cœur. Seul l'Esprit-Saint peut purifier totalement l'homme de ses passions et lui rendre le pouvoir sur lui-même, pouvoir qui lui a été ravi par le diable. L'homme impassible parvient à l'amour pur ; sa pensée demeure en permanence auprès de Dieu et en Dieu. Se sentant couvert par l'ombre de l'Esprit, se voyant vainqueur des pensées et des rêveries pécheresses, l'âme ressent son salut avec une joie ineffable. Cette joie n'a rien de commun avec les joies humaines habituelles qui proviennent de la présomption, de l'autosuffisance, de la flatterie ou de la réussite terrestre. La joie spirituelle qui annonce le salut est emprunte d'humilité et de gratitude envers Dieu, elle est accompagnée de larmes incessantes et abondantes, de prières continuelles, de jugement et d'abaissement de soi, elle confesse Dieu et Le glorifie, elle se manifeste par la mort au le monde. Elle est l'antichambre de la vie éternelle. Connaissant Dieu de façon vivante, elle proclame mystérieusement: un cri d'allégresse et de salut a retenti sous les tentes des justes. La droite du Seigneur a fait des prodiges, la droite du Seigneur m 'a exalté, la droite du Seigneur a fait des prodiges. Je ne mourrai pas, mais je vivrai et je raconterai les œuvres du Seigneur. Le Seigneur m'a châtié et châtié encore pour m 'éduquer, mais ne m'a pas livré à la mort. Ouvrez-moi les portes de la justice, j'y entrerai et je confesserai le Seigneur. C'est ici la porte du Seigneur, par elle les justes entreront. Je Te confesserai car Tu m'as exaucé et Tu t'es fait mon salut (Ps.117, 15-21).

Les portes du Seigneur, c'est l'humilité dans la grâce. Saint Jean Colobos dit à ce sujet : «Les portes de Dieu, c'est l'humilité. Nos pères sont entrés dans le temple de Dieu par la voie réjouissante de nombreuses humiliations. Lorsque les portes de la vérité divine s'ouvrent devant l'intellect, il cesse de juger le prochain, d'avoir de la rancœur à son égard, de l'accuser ou d'accuser les circonstances, de se justifier ; il reconnaît en tout ce qui advient l'inconcevable vérité divine et rejette sa propre vérité comme une abomination. C'est par ces portes que l'homme, lavé par les larmes de repentir et d'attendrissement, entre devant la face de Dieu par la prière pure et la vision spirituelle, confessant ses péchés innombrables et les incalculables bienfaits de Dieu ».
Fuyons le péché, notre meurtrier ! Fuyons non seulement les péchés mortels, mais aussi ceux qui sont pardonnables afin que par noire négligence, ils ne se transforment pas en une passion qui nous précipite en enfer de la même façon que le péché mortel !
Il y a des péchés pardonnables. Ainsi, quand il nous arrive de nous laisser entraîner par la gourmandise, par des pensées ou des regards de convoitise, par une parole méchante, un mensonge ou un vol insignifiant, par l'orgueil, la colère ou une brève tristesse, ou encore par quelque rancune pour le prochain, c'est que notre faiblesse humaine a été la cause du péché, et nous recevons facilement le pardon de Dieu si nous reconnaissons le mal et si nous nous repentons. Un péché pardonnable ne sépare pas le chrétien de la grâce divine et ne met pas son âme à mort comme le ferait un péché mortel. Toutefois ces péchés pardonnables sont pernicieux, et si nous ne nous repentons pas, ils multiplient leur poids. Selon la comparaison des saints pères, un homme peut être noyé par un sac de sable pendu à son coup de la même façon que par une lourde pierre. Un péché mortel peut nous entraîner dans l'abîme de l'enfer aussi facilement qu'une multitude de petits péchés pardonnables. Par exemple, qu'est-ce que le mauvais riche de l'Evangile avait fait de particulier en s'adonnant quotidiennement à des réjouissances, puisqu'il en avait les moyens ? L'Evangile propose comme unique cause de perdition sa vie distraite qui le mena à oublier complètement l'avenir éternel et la vertu. La distraction était devenue sa passion, il n'envisageait pas sa vie sans elle.
C'est un malheur que d'avoir le cœur blessé par les passions. Une circonstance tout à fait insignifiante peut provoquer une telle plaie. Un regard imprudent, vraisemblablement innocent, une parole inconsidérée, un attouchement léger, peuvent contaminer de façon incurable. Dans quel lourd péché pouvait bien tomber le reclus cité plus haut, lui qui était l'objet du respect particulier de ses concitoyens, lui qui ne sortait jamais de sa cellule, qui n'avait scandalisé personne, qui était une source d'édification pour beaucoup, et qui néanmoins périt pour sa communion invisible avec satan, empêchant ainsi l'Esprit Saint de reposer en lui ne fut-ce qu'une heure ?
Dans un couvent vivait jadis la nièce de l'higoumène, très belle de sa personne et d'une conduite irréprochable. Toutes les sœurs étaient édifiées par son apparence angélique et son extraordinaire modestie. Quand elle mourut, on l'enterra solennellement en étant persuadé que son âme pure s'était élevée vers les demeures du paradis. Chagrinée par sa disparition, l'higoumène se livra à une prière incessante, jointe au jeûne et aux veilles, et demanda au Seigneur de lui révéler de quelle gloire sa nièce avait été jugée digne dans le chœur des vierges. Une nuit, alors qu'elle priait, la terre s'ouvrit sous ses pieds et de la lave bouillonna devant elle. Saisie d'effroi, elle regarda dans l'abîme qui s'offrait à ses yeux. Dans les flammes, elle aperçut sa nièce.
- Mon Dieu, est-ce bien toi que je vois?
- Oui, prononça la défunte dans un terrible gémissement.
- Mais pourquoi? J'espérais te voir dans la gloire du Paradis, au sein du chœur angélique, parmi les pures brebis du Christ...Et toi... Pourquoi cela?
- Malheur à moi, maudite! Je suis moi-même la cause de ma mort éternelle dans cette flamme qui me brûle sans trêve, sans toutefois m'anéantir. Tu voulais me voir, et Dieu t'a révélé le secret de mon état.
- Mais pourquoi cela ?, demanda l'higoumène en larmes.
- Parce que devant vous je paraissais vierge, un ange sans péché, mais en réalité j'étais autre. Je ne me suis pas souillée par le péché charnel, mais mes pensées, mes rêveries coupables et mes désirs secrets m'ont fait' descendre dans la géhenne. Je n'ai pas su garder mon âme pure, ni mes pensées, ni les mouvements de mon cœur, malgré mon corps pur de jeune fille. C'est pour cela que je suis livrée à la souffrance. Par imprudence, je nourrissais en moi un sentiment d'attachement à l'égard d'un jeune homme, je jouissais en pensée de sa belle apparence, et je rêvais de m'unir à lui. Comprenant que c'était un péché, j'avais hâte de le confesser à mon père spirituel. La conséquence de ces jouissances coupables et de ses rêveries impures fut que les saints anges m'eurent en horreur après ma mort et me laissèrent entre les mains des démons. A présent, je brûle dans le feu de la géhenne, et je brûlerai éternellement sans être consumée, car il n'y a pas de fin aux tourments de ceux qui sont rejetés du ciel.
Ayant terminé ce discours, la malheureuse gémit, grinça des dents, puis fut happée par la lave brûlante et disparut des yeux de l'higoumène.
« Il faut garder son âme et veiller sur elle à tout prix afin qu'elle ne communie pas aux pensées mauvaises et méchantes. De même que le corps est contaminé par l'impureté s'il s'accouple avec un autre corps, l'âme se corrompt en s'unissant aux pensées mauvaises et méchantes et en leur donnant son accord » (Saint Macaire le Grand). Il faut concevoir ceci pas seulement pour un ou deux types de pensées pécheresses, mais pour toutes les mauvaises pensées en général : les pensées d'incroyance, de flatterie, de présomption, de colère, d'envie ou de jalousie. Le rejet de ces pensées conduit à la purification de toute souillure de la chair et de l'esprit (2Cor.7,1). Sache que dans le secret de l'âme s'accomplissent aussi sous l'effet des mauvaises pensées la corruption et l'égarement, selon les mots de l'Apôtre: Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira (1Cor.3,17). Par l'expression temple de Dieu, il faut entendre notre corps visible. Celui qui corrompt l'âme et l'esprit en s'unissant à la méchanceté est passible de châtiment. Il faut garder le corps du péché; il faut aussi garder l'âme, cette fiancée du Christ, des pensées mauvaises : Je vous ai fiancés à un seul Epoux pour vous présenter au Christ (2Cor.11,2). Garde ton cœur plus que toute autre chose, car de lui viennent les sources de la vie (Prov.4,23). Apprenons des Saintes Ecritures que les pensées tortueuses éloignent de Dieu (Sagesse1,3).
Concernant les passions, Saint Nil de la Sora dit : « La passion est sujette, soit à un repentir approprié, soit aux souffrances futures. Il faut se repentir de ses passions et prier d'en être libéré. Ce n'est pas le combat intérieur contre les passions qui provoque les souffrances futures, mais l'absence de repentir. Comme dit Saint Pierre Damascène, si le combat était châtié par des souffrances éternelles, alors il n'y aurait pas de pardon des péchés sans une totale impassibilité. Pourtant, nombreux sont ceux qui ont reçu le pardon de leurs péchés. Les pères disent que celui qui est attaqué par quelque passion doit lui résister avec soin. Prenons l'exemple de l'adultère. Celui qui est attaqué par un désir pour une personne doit éviter à tout prix de converser avec elle, de demeurer avec elle, de toucher son vêtement ou même de le sentir. S'il ne se garde pas de tout cela, il accomplit sa passion et commet l'adultère dans son cœur par la pensée. Il attise lui-même le brasier de la passion et laisse les pensées malignes pénétrer dans son cœur comme des bêtes sauvages » (homélie 1).
Préparons-nous à J'éternité, à passer vers elle par la mort, et ceci pendant notre vie terrestre, qui n'est autre que l'antichambre de l'éternité. La vie terrestre n'est pas la vie à proprement parler mais un combat incessant entre la vie et la mort. Nous penchons tour à tour vers l'une ou l'autre, nous hésitons. Si nous appréciions avec justesse ce bref moment de notre passage sur la terre en le comparant à la grandiose éternité, nous ne trouverions qu'un seul moyen de l'employer : la préparation à l'éternité. C'est ainsi qu'en juge la parole de Dieu : Ne crains point petit troupeau, car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume vendez ce que vous possédez- et donnez-le en aumônes Faites-vous des bourses qui ne s'usent point, un trésor inébranlable dans les cieux, où le voleur ne s'approche point et où la mite ne détruit point, car là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. Que vos reins soient ceints et vos lampes allumées Soyez semblables à des hommes qui attendent que leur maître revienne des noces, afin de lui ouvrir dès qu'il arrivera et frappera ; bienheureux le serviteur que le maître, à son arrivée, trouvera veillant. Je vous le dis en vérité, il se ceindra, le fera mettre à table et s'approchera pour le servir. Qu'il arrive à la deuxième ou à la troisième veille, bienheureux ce serviteur, s'il le trouve en train de veiller. Sachez-le bien, si le maître de la maison savait à quelle heure le voleur doit venir, il veillerait et ne laisserait pas percer sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts, car le Fils de l'homme viendra à l'heure où vous n'y penserez pas. Quel est donc l'économe fidèle et sage que le maître établira sur ses gens pour leur donner la nourriture en temps convenable? Bienheureux ce serviteur que le maître trouvera faisant ainsi à son arrivée ! Je vous le dis en vérité, il l'établira sur tous ses biens. Mais si ce serviteur dit en lui-même: mon maître tarde à venir, s'il se met à battre les serviteurs et les servantes, à manger, à boire et à s'enivrer, le maître de ce serviteur viendra le jour où il ne s'y attend pas et à l'heure qu'il ne connaît pas. Il le mettra en pièces et lui donnera sa part avec les infidèles (Luc12, 32-40, 42-46).

mardi 24 janvier 2012

PAROLE SUR LA MORT 7

CHAPITRE VII : LES DOUANES OU EPREUVES SUBIES PAR L'ÂME DE SAINTE THEODORA DURANT SON ASCENSION VERS LE CIEL .

Ce texte est proposé aux chrétiens orthodoxes qui fréquentent régulièrement les offices de l'Eglise ainsi que les sacrements, qui ont une vie de prière intérieure et qui ont un père spirituel chez qui ils se confessent régulièrement. Pour les autres, nous craignons qu'il provoquera chez eux des réactions négatives et pourraient être peturbés dans leur psyché.

Il pourrait-y avoir des passages difficiles qui, probablement, vont heurter la sensibilité de notre entendement humain. Prière de garder à la mémoire la pensée que Christ est venu sauver ceux qui espèrent en Lui, que la vie a jailli du tombeau et le Seigneur nous l'a accordée par le Saint baptême et les sacrements de l'Eglise.
Ce texte sur Sainte Theodora a été emprunté à une vie de Saint Basile qui a vécu au neuvième siècle à constantinople, ce texte selon les derniers spécialistes a été écrit quatre siècles après la mort de saint Basile, donc beaucoup de questions sur son authenticité ont été récemment posées et plusieurs chercheurs doutent de sa véracité. Cela étant dit, Saint Ignace l'a adopté et l'a inclus dans son traité. Prière donc de prendre cette histoire avec des pincettes et de ne pas s'alarmer à outrance de la dureté de son contenu.





C'est à Sainte Théodora que nous emprunterons la description détaillée des épreuves et l'ordre dans lequel elles se déroulent dans les airs. Ayant, comme nous l'avons vu, abandonné sur la terre son corps sans vie, elle commença son ascension vers l'orient, guidée par deux anges.
Alors qu'elle montait vers le ciel, elle rencontra les esprits ténébreux de la première épreuve, qui examinent tous les péchés humains commis en parole, comme les bavardages, les jurons, les railleries, les blasphèmes, les chansons passionnelles, les exclamations indécentes, les rires et autres choses semblables. Le plus souvent, l'homme ne fait aucun cas de ces péchés, ne s'en repent pas devant Dieu et ne les confesse pas à son père spirituel. Cependant, le Seigneur a dit clairement : Au jour du jugement, les hommes rendront compte de toutes les paroles vaines qu'ils auront proférées. Car par tes paroles tu seras justifié, et par tes paroles tu seras condamné (Mt.12,36-37). Et l'Apôtre ordonne : Qu’il ne sorte de votre bouche aucune parole mauvaise, ni déshonnête, ni propos insensé, ni plaisanterie (Eph.4,29845,4). Les démons accusèrent l'âme de Théodora avec cruauté et ténacité, présentant tous les péchés commis en parole depuis sa jeunesse. Les saints anges les contestèrent, opposant les bonnes œuvres.
Rachetée à la première épreuve, Théodora monta plus haut et s'approcha de la deuxième épreuve, où sont examinés les mensonges, les parjures, le fait de prononcer en vain le Nom de Dieu ou de dissimuler ses péchés au père spirituel lors de la confession.
S'étant libérée là aussi, elle passa à la troisième épreuve, où sont examinés les calomnies contre le prochain, les jugements, l'humiliation, l'atteinte à l'honneur d'autrui, les injures et les railleries faites en oubliant ses propres péchés et défauts, ou en y prêtant aucune attention. Ceux qui ont commis des péchés de ce genre sont questionnés par les féroces examinateurs avec une cruauté toute particulière, car ils se sont conduits comme des antéchrists, ils se sont approprié la dignité du Christ en jugeant et en écrasant leur prochain.
La quatrième épreuve est celle de la gourmandise. On y dénonce la gloutonnerie, l'ivrognerie, le fait de manger à tout moment ou en cachette, de manger sans dire la prière, la transgression des jeûnes, la luxure, la volupté, le rassasiement, le fait de participer à des festins, et tous les plaisirs accordés au ventre. Après s'être libérée de cette épreuve, Sainte Théodora reprit un peu courage et dit aux saints anges qui l'accompagnaient : « Il me semble que personne sur terre ne sait ce qui se passe ici et ce qui attend l'âme pécheresse après la mort ». Les anges lui répondirent : « La Parole Divine, lue quotidiennement à l'église, et prêchée par les serviteurs de Dieu ne l'explique-t-elle donc pas ? Ceux qui se sont attachés aux vanités terrestres ne prêtent aucune attention à la Parole de Dieu, ils jouissent quotidiennement de l'ivrognerie, ils mangent à satiété et boivent sans crainte de Dieu, ne pensent pas à la vie future et n'écoutent pas l'Ecriture qui dit : malheur à vous qui êtes rassasiés car vous aurez faim ! (Luc6,25). Ils considèrent la Sainte Ecriture comme une fable, vivent dans la négligence, s'amusent et festoient joyeusement chaque jour au son de la musique et des chœurs, à l'instar du riche de l'Evangile, Toutefois, ceux qui sont miséricordieux, font profiter les pauvres de leurs bienfaits, et aident les nécessiteux, reçoivent facilement le pardon de Dieu pour leurs péchés et passent les épreuves avec bonheur grâce à leurs aumônes. L'Ecriture dit : L'aumône délivre de la mort et purifie de tout péché. Celui qui fait des aumônes et agit avec justice aura la vie; ceux qui commettent le péché sont les ennemis de leur vie. (Tobie21). Ceux qui ne s'efforcent pas de se purifier de leurs péchés par des aumônes ne pourront pas éviter le malheur lors des épreuves, ils seront ravis par les publicains qui les feront descendre dans de cruelles souffrances vers les prisons souterraines de l'enfer où ils seront enchaînés jusqu'au terrible jugement du Christ 1 »
En s'entretenant ainsi, ils atteignirent la cinquième épreuve, celle de la paresse. Là furent comptés tous les jours et toutes les heures passés dans la négligence à servir Dieu. Là furent examinés l'acédie, l'abandon des prières à l'église ou dans la cellule, par paresse, négligence, ou froideur envers Dieu. Là sont questionnés les paresseux qui profitent du travail des autres et refusent de travailler eux-mêmes, ceux qui perçoivent un salaire mais accomplissent leur travail avec négligence.
Après vint la sixième épreuve, où l'on examine les vols et les rapts en tout genre, grossiers ou selon la bienséance, manifestes ou cachés.
Puis vint la septième épreuve, celle de l'amour de l'argent et de l'avarice.
Ensuite vint la huitième épreuve, où sont accusés les concussionnaires, les usuriers et ceux qui s'approprient le bien d'autrui.
Plus loin encore, l'épreuve de l'injustice, la neuvième épreuve, où sont dénoncés les juges iniques au jugement partiel, qui se laissent acheter, condamnent les innocents et justifient les coupables. Là sont examinées les balances inexactes, les marchandages injustes.
La dixième épreuve est l'épreuve de l'envie où sont examinés ceux qui s'adonnent à cette passion pernicieuse et à ses conséquences.
A la onzième épreuve, les esprits hautains examinent l'orgueil, la vanité, la présomption, le dédain, la louange de soi-même, le fait de ne pas honorer comme il se doit les parents, les pouvoirs ecclésiastiques ou civils, de ne pas leur obéir ou de leur désobéir.
La douzième épreuve est celle de la colère et de la fureur.
La treizième épreuve est celle de la rancune. Après avoir dépassé cette épreuve, Sainte Théodora demanda aux anges :
- Je vous en prie, dites-moi comment ces effrayantes puissances aériennes connaissent les mauvaises actions, autant manifestes que cachées, de tous les hommes vivant dans le monde entier.
- Au saint baptême chaque homme reçoit un ange gardien qui veille invisiblement sur lui, l'instruit nuit et jour dans les bonnes actions, tout au long de sa vie et jusqu'à l'heure de la mort. Il note toutes les bonnes actions pour lesquelles cet homme serait susceptible d'être digne de la miséricorde du Seigneur et de la rétribution éternelle. De la même façon, le prince des ténèbres, qui a pour objectif d'entraîner dans la perdition le genre humain, envoie auprès de chaque homme un esprit malin qui le suit partout, note ses mauvaises actions, lui suggère astucieusement de faire le mal, puis visite chaque épreuve pour y rapporter les péchés correspondants. Voilà comment les pouvoirs aériens connaissent les péchés de tous les hommes. Quand l'âme se sépare du corps et s'efforce de monter rejoindre son Créateur au ciel, les esprits malins lui dressent des obstacles en dénonçant les péchés qu'ils ont inscrits. Si l'âme possède davantage de bonnes actions que de péchés, ils ne pourront pas la retenir. Dans le cas contraire, ils l'enfermeront dans une prison d'où elle ne pourra pas voir Dieu. Elle sera torturée tant que la puissance de Dieu le permettra, et tant qu'elle n'aura pas été rachetée par les prières de l'Eglise et les aumônes des proches. Si l'âme s'avère vraiment pécheresse et abominable devant Dieu, au point qu'il ne lui reste plus aucune espérance de salut et qu'elle soit digne de la perdition éternelle, alors elle sera descendue immédiatement dans l'abîme où les démons connaîtront eux-aussi les souffrances éternelles. Elle y sera gardée jusqu'au deuxième Avènement du Christ, après quoi elle s'unira au corps et souffrira avec lui dans la géhenne éternelle. II faut savoir encore que ceux qui empruntent la voie des épreuves et des questions sont uniquement ceux qui ont été éclairés par la foi chrétienne et lavés par le Saint Baptême. Elle n'est donc destinée ni aux païens, ni aux musulmans, ni à tous ceux qui sont étrangers à Dieu : ceux-là, encore vivants dans leur corps, sont déjà morts, et enterrés en enfer par l'âme. Au moment de leur mort, les démons les saisissent immédiatement comme un dû et les descendent sans épreuve dans l'abîme de la géhenne.
Après cet entretien, Sainte Théodora atteignit la quatorzième épreuve, celle du meurtre, où sont examinés non seulement le brigandage et le meurtre, mais aussi les coups, les gifles et les heurts.
Plus haut eut lieu la quinzième épreuve, celle de la magie, de la sorcellerie, des charmes, des poisons, de l'ensorcellement et de l'invocation des démons. Au cours de cette épreuve, les démons ne trouvèrent rien à reprocher à la bienheureuse Théodora et ils lui crièrent, furieux: « Quand tu arriveras à l'épreuve de l'adultère, nous verrons si tu pourras t'en tirer...». En continuant à s'élever, elle demanda aux saints anges:
- Est-ce possible que tous les chrétiens doivent passer par ces lieux, et que personne ne puisse les traverser sans être soumis aux questions et à la peur?
- Il n'y a pas d'autre voie pour les âmes chrétiennes qui montent vers le ciel. Toutes passent ici, mais toutes ne sont pas questionnées comme celles qui ont commis des péchés sans les avoir complètement confessés, par honte devant le père spirituel. Si quelqu'un confesse ses péchés dans la vérité, les regrette et se repent du mal qu'il a commis, alors ses péchés sont effacés par la miséricorde de Dieu, et quand l'âme arrive ici, les examinateurs aériens ne trouvent rien en ouvrant les livres, c'est pourquoi ils ne peuvent ni offenser l'âme, ni l'effrayer, et c'est ainsi qu'elle s'élève joyeusement vers le trône de la grâce.
NB: Saint Jean Climaque raconte que pendant un séjour dans un monastère d'Alexandrie, un voleur se présenta avec repentir pour être admis à la vie monastique. L'higoumène du monastère lui demanda qu'il confesse ses péchés à l'église en présence de tous les frères. Le voleur s'étant exécuté avec ferveur et humilité, l'higoumène le revêtit immédiatement du schème. Saint Jean lui demanda en privé pourquoi il avait tonsuré aussi vite le voleur. L'higoumène répondit que sa confession lui avait mérité le pardon de toutes ses fautes. «Et n'en doute pas, car un des frères présents m'a fait une confidence. Il a vu un personnage à l'aspect terrible qui tenait en main une tablette écrite et une plume. Tandis que le pénitent avouait ses crimes, l'autre, en toute justice, les effaçait de la tablette avec la plume, selon qu'il est écrit : J'ai dit: je vais confesser contre moi mes péchés au Seigneur et Toi, tu as pardonné l'iniquité de mon cœur (Ps.31,5)» (Echelle, degré4)
Il n'est pas inutile de citer ici un événement qui nous est presque contemporain. Dans les environs de Vologda se trouve un grand village dénommé Koubensky, qui compte plusieurs paroisses. Le prêtre de l'une d'elle tomba malade et s'approcha de la mort. Il vit son lit entouré de démons qui s'apprêtaient à ravir son âme et à la descendre en enfer. Alors apparurent trois anges. L'un d'entre eux se posta près du lit et se mit à disputer l'âme à un démon des plus hideux qui tenait un livre ouvert où étaient inscrits tous les péchés du prêtre. Sur les entrefaites entra un autre prêtre qui venait assister son confrère. La confession commença. Jetant des regards effrayés sur le livre, le malade prononçait avec abnégation ses péchés, comme s'il les rejetait de lui-même. Et que vit-il ? Dès qu'il mentionnait un péché, celui-ci disparaissait du livre en laissant une page blanche. Il effaça ainsi par la confession tous les péchés du livre démoniaque et fut guéri. Il finit sa vie dans un profond repentir, racontant à ses proches, pour leur instruction, cette vision qu'avait soulignée une guérison miraculeuse.
En conversant ainsi, ils atteignirent la seizième épreuve, celle de la dépravation, où sont examinés tous les genres de débauche, c'est-à-dire les péchés d'adultère des personnes qui ne sont pas liées par le mariage. On y examine les rêveries coupables, le fait de s'attarder en pensée sur ces rêveries, le consentement au péché et la jouissance, les regards voluptueux, les attouchements obscènes. Quand Théodora fut parvenue à cette épreuve, les esprits ténébreux furent très étonnés qu'elle soit arrivée jusque-là, et ils l'accusèrent avec cruauté, surtout pour son manque de franchise envers son père spirituel.
Ensuite, ils arrivèrent à la dix-septième épreuve, où sont examinés tous les péchés d'adultère des personnes vivant dans le mariage (le fait de ne pas respecter la fidélité entre époux, de souiller le lit conjugal) ou les péchés d'adultère des personnes consacrées à Dieu, qui ont promis au Christ leur pureté.
La dix-huitième épreuve est celle de l'homosexualité, où sont passés en revue les péchés d'adultère contraires à la nature, ainsi que l'inceste. Après avoir dépassé cette épreuve les saints anges dirent à Théodora: «Tu as vu les terribles et abominables épreuves de l'adultère! Sache que rare est l'âme qui les dépasse librement. Le monde entier est enfoncé dans le mal des tentations et de la souillure, tous les hommes sont voluptueux et débauchés. Les pensées du cœur de l'homme sont mauvaises dès sa jeunesse (Gen.8,21) et c'est à peine si quelqu'un se garde de la souillure de l'adultère. Peu nombreux sont ceux qui mettent à mort les convoitises de la chair et qui dépassent sans encombre ces épreuves! La plupart de ceux qui sont arrivés jusque là périssent. Les féroces questionneurs ravissent les âmes et les précipitent en enfer. Les puissances des épreuves d'adultère se vantent qu'à eux seuls, ils remplissent plus que toutes les autres épreuves les fournaises de l'enfer. Rends grâce à Dieu, Théodora, d'avoir évité les pièges des épreuves d'adultère, et ceci grâce aux prières de ton père Saint Basile. A présent, tu ne connaîtras plus la peur ! ».
La dix-neuvième épreuve est celle des hérésies, où sont examinés les raisonnements injustes sur la foi, les doutes dans la foi, l'apostasie et le reniement de la foi orthodoxe, le blasphème et autres péchés contre la seule véritable confession de la foi.
Après avoir dépassé cette épreuve, ils approchèrent des portes célestes, et rencontrèrent les esprits de la dernière et vingtième épreuve, celle de l'absence ou de l'insuffisance de charité, et de la cruauté. Si quelqu'un accomplit de nombreux exploits spirituels, des jeûnes, des veilles, des métanies, des prières, s'il garde de toute souillure la pureté de sa virginité, s'il épuise son corps dans l'abstinence, mais se montre impitoyable et ferme son cœur au prochain, alors il sera précipité du haut du ciel lors de cette épreuve, et sera enfermé pour l'éternité dans l'abîme de l’enfer.
Enfin, avec une joie ineffable, ils s'approchèrent des portes célestes. Celles-ci brillaient comme du cristal. Elles rayonnaient de manière indicible et des jeunes gens semblables au soleil se tenaient au milieu d'elles. Voyant la sainte guidée par les anges, ils se réjouirent pour elle de la voir dépasser victorieusement, couverte par la miséricorde divine, les épreuves aériennes. Avec grand amour, ils la firent traverser les portes. Pendant sa marche à travers les épreuves, Sainte Théodora avait noté que chaque épreuve était présidée par un prince particulier, et que les esprits de chaque épreuve présentaient une apparence extérieure conforme au type de péché examiné à l'épreuve.
Les grands saints (qui par nature sont semblables à l'ancien Adam, mais sont parvenus à la perfection du Nouvel Adam, notre Seigneur Jésus-Christ) traversent les épreuves à une vitesse extraordinaire et avec grande gloire. Ils sont élevés au ciel par l'Esprit Saint qui, déjà pendant leur pèlerinage terrestre, leur inspirait constamment le désir de se séparer du corps et d'être avec le Christ (Phil.1,23). Le grand Marc de Thrace (5avril) traversa l'atmosphère comme un éclair, en l'espace d'une heure. Saint Sérapion, qui assista au décès de Saint Marc, dit: «Je vis l'âme du saint séparée des liens charnels, et élevée au ciel après avoir été recouverte d'un vêtement blanc et lumineux par un ange».
Lorsqu'arriva la mort de Saint Macaire le Grand, une multitude de l'armée céleste se joignit au chérubin qui était son ange gardien pour venir chercher son âme. Avec l'assemblée des anges descendit le chœur des apôtres, des martyrs, des saints hiérarques, des saints et des justes. Les démons se rangèrent en foule tout au long des épreuves, afin de contempler la marche de l'âme pneumatophore. Elle commença son ascension. Se tenant au loin, les esprits des ténèbres criaient depuis le lieu des épreuves : «ô, Macaire De quelle gloire as-tu été digne !». Mais l'humble moine répondait : «Non ! Je crains encore parce que je ne sais pas si j'ai fait quelque chose de bien ! ». Pendant ce temps, il s'élevait rapidement vers le ciel. Les pouvoirs aériens criaient dé nouveau à partir des épreuves plus élevées : «Tu nous as vraiment évités, Macaire !». «Non, j'ai encore besoin de fuir ! ». Lorsqu'il franchit les portes célestes, ils crièrent en sanglotant de rage et d'envie : «Maintenant, tu nous as évités, Macaire !». «Gardé par la puissance de mon Christ, j'ai évité vos astuces ! ». Le cheminement de l'âme de Saint Macaire fut observé par ceux de ses disciples qui avaient atteint une réussite spirituelle particulière, et c'est Saint Paphnuce, son successeur à la direction du skyte, qui le raconte.
Les grands saints mènent, toute leur vie durant, un combat implacable contre les pouvoirs ténébreux. Ils ont déjà remporté la victoire ici-bas, car leurs cœurs se sont libérés totalement du péché, devenant temples et sanctuaires de l'Esprit Saint qui fait en eux Sa demeure raisonnable, une forteresse imprenable pour l'ange déchu. C'est pourquoi ils passent avec une telle aisance devant les gardiens aériens et les pouvoirs ténébreux.
De la même façon que l'âme chrétienne ressuscite déjà pendant son pèlerinage terrestre de la mort occasionnée par le péché, elle voit s'accomplir déjà ici-bas son examen par les pouvoirs aériens, sa captivité ou sa libération. Mais cette captivité, ou cette libération, ne deviendra évidente que lors de la marche à travers les airs.
Au Paradis, l'homme reçut le commandement de ne pas goûter à l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Comme dit Marc l'ascète dans son homélie sur le Paradis et la loi spirituelle, ce commandement n'a pas été abrogé. A présent encore, il est interdit de voir le mal dans son prochain, de le condamner, de se venger de lui, de rendre le mal pour le bien. Il est interdit de regarder avec convoitise la beauté de la femme, beauté qui, avant la chute, ne suscitait aucune convoitise. Il est interdit de prononcer des paroles de blasphème, telle qu'on a pu en entendre de la bouche du diable au Paradis, et également de prononcer en vain le Nom de Dieu. Interdites aussi les paroles vaines et les pensées pécheresses.
Saint Macaire le Grand dit : «Le bienheureux Moïse, pour exprimer de façon imagée que l'âme ne doit pas suivre simultanément deux principes contradictoires, c'est-à-dire le bien et le mal, mais doit au contraire s'attacher au bien, et qu'elle ne doit pas non plus produire de fruits doubles, utiles et nuisibles, a dit: tu ne laboureras pas avec un bœuf et un âne attelés ensemble (Dt.22,9-10). Ceci signifie que la vertu et la méchanceté ne doivent pas agir ensemble dans l'enclos de ton cœur, mais que seule la vertu doit agir».
Le même dit encore: «Tu ne porteras point un vêtement tissé mi-laine, mi-lin. Tu ne sèmeras pas dans ton champ deux espèces de semences (Dt.22,11). Tu n'accoupleras pas deux bestiaux de deux espèces (Lev.19,19). Tout cela exprime mystérieusement que ne doivent pas être semées en nous méchanceté et vertu, mais qu'une seule espèce de fruit doit naître dans l'âme, le fruit de la vertu, et que l'âme ne doit pas communiquer avec deux esprits, l'Esprit de Dieu et l'esprit du monde».
Comme jadis dans le Paradis, l'homme a devant lui aujourd'hui son meurtrier, le chérubin déchu. Il agite son arme flamboyante et combat l'homme implacablement, s'efforçant de l'entraîner à transgresser le commandement de Dieu, le poussant vers une perdition autrement plus pénible que celle de nos ancêtres. Malheureusement, notre ennemi est de plus en plus encouragé par ses succès. Les plus grands pères (Macaire le Grand, Marc l'ascète,...) Voient dans l'arme flamboyante agitée par les mains du prince des airs le pouvoir démoniaque qui ébranle l'esprit et le cœur de l'homme «en les enflammant par diverses passions. L'Apôtre appelle les armes de l'ennemi des flèches flamboyantes (Eph.6,10) et le prophète compare leur action dans l'âme à celle du feu dans les épines (Ps.117,12). Saint Syméon le Nouveau Théologien dit: « Depuis le moment où le diable organisa par la désobéissance le bannissement de l'homme du Paradis et la rupture de sa communion avec Dieu, il reçut, avec les démons, la liberté d'ébranler la raison de chaque homme, les uns davantage, les autres moins. L'intellect ne peut se protéger que par le souvenir incessant de Dieu. Quand la puissance de la Croix grave le souvenir de Dieu dans le cœur, alors le raisonnement devient inébranlable. C'est à cela que mène l'ascèse mentale par laquelle chaque chrétien s'est engagé à combattre sur le champ de bataille de la foi. Sans ce résultat, l'exploit est vain».
Les commandements concernent les actes et les paroles, mais surtout leur origine commune, les pensées. Le combat que l'ennemi nous livre est d'ailleurs dirigé de préférence contre l'intellect. L'intellect est le guide de l'homme ; s'il ne consent pas secrètement au péché, alors ni les paroles pécheresses, ni les actes pécheurs ne peuvent naître. Comme dit Saint Hésychius de Jérusalem dans son homélie sur la vigilance : l'arme de l'ennemi, c'est la pensée ou la rêverie coupable. L'homme doit combattre les puissances de l'air dans le pays des pensées. C'est là qu'il remporte la victoire ou subit la défaite. C'est là qu'il se libère des publicains ou qu'il se soumet à eux. C'est là que se décide sort destin éternel. Il choisit librement, soit la vie éternelle accordée par le Créateur et offerte par le Rédempteur, soit la mort éternelle annoncée jadis au Paradis par Dieu dans Sa justice, comme châtiment de la créature qui dédaigne les bienfaits de son Créateur.
Le très grand et saint Apôtre Paul nous appelle à ce combat en disant : revêtez-vous de toutes les armes de Dieu, afin de pouvoir tenir ferme contre les ruses du diable, car nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les dominations, les autorités, contre les princes de ce monde des ténèbres, contre les esprits méchants dans les lieux situés en-dessous des cieux (Eph.6,11-12). L'Apôtre indique même le lieu de ce terrible combat et les armes qu'il nous faut employer : les armes avec lesquelles nous combattons ne sont pas charnelles, mais elles sont puissantes par la vertu de Dieu, pour renverser des forteresses. Nous renversons les raisonnements et toute hauteur qui s'élève contre la connaissance de Dieu et nous amenons toute pensée captive à l'obéissance du Christ (2Cor.10,4-5). L'Apôtre ordonne de capturer dans l'obéissance au Christ non seulement les pensées pécheresses qui Lui sont manifestement opposées, mais aussi toute notre intelligence. Notre adversaire rusé et expérimenté dans la perte des hommes ne suggère pas des pensées manifestement coupables dès le début d'un entretien, mais il s'efforce plutôt d'opposer à l'intelligence spirituelle (l'enseignement évangélique) l'intelligence humaine naturelle, déchue, charnelle et psychique; en la présentant comme saine, bien fondée, juste et grande. Il éloigne ainsi l'homme de l'obéissance au Christ.
«Lorsque le diable voit quelqu'un qui ne désire pas pécher, il n'est pas assez insensé pour lui proposer un mal manifeste. Il ne lui dit pas : va commettre l'adultère ou va voler. Il sait que nous ne voulons pas cela et il ne se donne pas la peine de parler de ce que nous ne voulons pas, mais il essaie de trouver en nous un désir quelconque, ou quelque justification de nous-mêmes et par cela, il nous nuit. Et c'est pourquoi l'Ecriture dit : le malin commet un mal lorsqu'il s'unit au juste (Prov.11,15). Le malin, c'est le diable. Il commet un mal lorsqu'il unit sa vérité à la nôtre ; alors il s'affermit, il nuit davantage, il agit. Lorsque nous nous laissons diriger par nos désirs en suivant notre vérité, alors, ayant l'air de faire une bonne action, nous nous faisons du tort à nous-mêmes et nous ne remarquons même pas comment nous périssons ! . (Saint Dorothée de Gaza).
Pour illustrer la flatterie, l'adulation et la malignité employées par le diable pour s'emparer de la volonté de l'homme et lui faire déposer le joug du Christ, Saint Macaire cite le combat suivant : «Quelqu'un, en se disputant avec son frère, se trouble lui-même et pense ainsi : faut-il lui dire ceci ou cela ? Non, je ne lui dirai pas ! Il me dénigre tant ! Dois-je le contredire ? Il vaut mieux que je me taise ! C'est vrai, nous avons les commandements de Dieu, mais il faut aussi se préoccuper de son honneur... Ainsi, il est difficile de renoncer complètement à soi-même»: L'Apôtre recommande de renoncer résolument et totalement à soi-même, de revêtir toutes les armes de Dieu, et non de se ceindre d'une seule d'entre elles. Le jeûne seul ne suffit pas, pas plus que la prière, les aumônes ou la chasteté. Les armes de Dieu, ce sont tous les commandements évangéliques. Celui qui dédaigne l'un d'eux les rejette tous. Celui qui dédaigne l'un d'eux sera appelé le plus petit dans le Royaume des Cieux (Mt.5,19), sera précipité dans la géhenne de feu, comme dit Saint Théophylacte de Bulgarie en commentant l'Evangile. J'ai été redressé grâce à tous, tes commandements, j'ai haï toute voie d'injustice (Ps.118,128). Prenez toutes les armes de Dieu, afin de résister dans le mauvais jour et de tenir ferme après avoir tout surmonté (Eph.6,13). Seul celui qui a pris toutes les armes de Dieu peut résister dans le mauvais jour, seul celui qui a accompli tous les commandements sans exception peut tenir ferme devant l'ennemi.
«Le mauvais jour, c'est l'heure de la tentation cruelle et de l'attaque du diable auxquelles sont soumis les courageux soldats du Christ pendant leur pèlerinage terrestre. Les vainqueurs de ce combat passent de la mort éternelle à la résurrection de l'âme. (De bons exemples de ceci seront trouvés dans la vie de Saint Antoine le Grand, ou dans celle de Saint Jean le Grand-Souffrant des grottes). Pour les autres chrétiens, le mauvais jour, c'est celui de la séparation de l'âme et du corps, le jour de la traversée des épreuves aériennes. Les saints se revêtent de toutes les armes de Dieu. Leur règle de vie est l'Evangile, la parole de leur bouche, de leur esprit et de leur cœur, c'est la parole de Dieu (Eph.6,18), le Nom du Seigneur Jésus-Christ. Avec cette épée spirituelle, ils vainquent et brisent l'arme flamboyante agitée devant eux par l'ennemi, c'est-à-dire les paroles du diable. Les rêveries démoniaques ne peuvent pénétrer dans leurs âmes, elles perdent sur elles tout pouvoir. Par la veille et une vigilance sévère, les saints sont attentifs à leur cœur et à leur esprit. Illuminés par la grâce de Dieu, ils sentent de loin l'approche des voleurs et des meurtriers menteurs. Se servant de leur attention comme d'un miroir, ils y voient le reflet des visages noirs des éthiopiens spirituels» (Saint Hésychius). En rejetant tout rapport avec eux déjà ici-bas, ils les privent de tout droit sur eux. Après leur mort, ils passent sans obstacle devant les pouvoirs aériens qu'ils avaient dédaignés en temps utile.
Saint Macaire le Grand dit: «Seul celui qui renonce véritablement au monde, qui vit dans l'ascèse, qui dépose le joug terrestre, qui se libère et s'éloigne sincèrement des désirs vains, des passions chamelles, des honneurs, qui reçoit secrètement l'aide du Seigneur dans les exploits spirituels cachés, qui demeure fermement au service de Dieu et se donne à Lui définitivement par l'âme et le cœur, celui-là seul, je l'affirme, rencontre une résistance, des passions secrètes, des filets invisibles, un combat caché, une lutte intérieure. Au milieu de ce combat, il prie Dieu en permanence et
reçoit du ciel les armes spirituelles décrites par le bienheureux Apôtre : la cuirasse de la justice, le casque du salut, le bouclier de la foi et l'épée de l'Esprit. Ainsi armé, il peut résister aux astuces cachées des ennemis. Ayant acquis ces armes au moyen de la prière, de la patience, des demandes, du jeûne, de la foi, il peut mener courageusement le combat contre les dominations, les autorités et les princes de ce monde des ténèbres (Eph.6,14). Ayant vaincu le pouvoir de l'adversaire avec l'aide de l'Esprit et ses propres vertus, il peut devenir digne de la vie éternelle».

lundi 23 janvier 2012

PAROLE SUR LA MORT 6

CHAPITRE VI : TEMOIGNAGES PATRISTIQUES ET LITURGIQUES SUR LES EPREUVES SUBIES PAR L'ÂME LORS DE SON ASCENSION VERS LE PARADIS.


Ce texte est proposé aux chrétiens orthodoxes qui fréquentent régulièrement les offices de l'Eglise ainsi que les sacrements, qui ont une vie de prière intérieure et qui ont un père spirituel chez qui ils se confessent régulièrement. Pour les autres, nous craignons qu'il provoquera chez eux des réactions négatives et pourraient être peturbés dans leur psyché.


Il pourrait-y avoir des passages difficiles qui, probablement, vont heurter la sensibilité de notre entendement humain. Prière de garder à la mémoire la pensée que Christ est venu sauver ceux qui espèrent en Lui, que la vie a jailli du tombeau et le Seigneur nous l'a accordée par le Saint baptême et les sacrements de l'Eglise.







Après la Rédemption du genre humain par notre Seigneur Jésus-Christ, Dieu, dans Sa mystérieuse sagesse, permit aux hommes de choisir entre la vie et la mort, d'accepter ou de refuser le Rédempteur et la Rédemption. Malheureusement, très nombreux sont ceux qui désirent rester en communion avec satan, vivre la captivité et l'esclavage sous sa coupe, en se déclarant ouvertement ennemis du Sauveur et de Son enseignement divin. Nombreux aussi sont ceux qui s'enrôlent dans Son armée et déclarent être Ses serviteurs, mais trahissent leurs engagements, par leurs actes manifestes ou cachés, par leur union aux esprits du mal. Tous ceux qui rejettent ouvertement le Rédempteur constituent déjà l'héritage de satan. Leurs âmes vont directement en enfer en quittant le corps. Quant aux chrétiens qui se tournent vers le péché, ils sont indignes de passer directement de la vie terrestre à la béatitude éternelle. La justice exige que les manquements, les trahisons du Rédempteur soient pesés et évalués. Un jugement minutieux est indispensable afin de définir ce qui aura prévalu de la vie éternelle ou de la mort éternelle. Chaque âme chrétienne qui quitte le corps doit s'attendre à ce jugement impartial de Dieu. Comme le dit le saint Apôtre Paul : il est réservé aux hommes de mourir une seule fois, après quoi vient le jugement (Hb.9,27).
La justice de Dieu s'accomplit par l'intermédiaire des saints anges et des démons. Ils jugent les âmes qui viennent de quitter le corps. Les saints anges connaissent toutes les bonnes œuvres de la vie terrestre et les méchants les infractions à la loi de Dieu. Lorsque l'âme du chrétien commence à s'élever vers le ciel, guidée par les saints anges, les esprits des ténèbres l'accusent de tous les péchés qui n'ont pas été effacés par le repentir, comme autant de sacrifices à satan, de gages de communion au même destin éternel que lui.
Pour torturer les âmes qui traversent les espaces aériens, les pouvoirs ténébreux ont installé dans un ordre remarquable des tribunaux spéciaux avec leurs assesseurs. Tout au long de ces étapes aériennes, depuis la terre jusqu'au ciel même, la cohorte des esprits déchus monte la garde. Chaque section examine un péché particulier et torture l'âme à son passage. Chez les pères, les gardiens et les tribunaux des démons s'appellent épreuves, et les esprits déchus qui les président sont qualifiés de publicains.
Au temps du Christ et des premiers siècles de l’Eglise, on appelait publicains les collecteurs d'impôts de l'état. Cette charge était confiée à des personnes sans responsabilités définies. Ces publicains, qui n'étaient pas tenus de rendre des comptes, se permettaient toutes sortes de violence, d'astuces, d'abus et de pillages inhumains. Ils se postaient habituellement aux portes des villes, sur les marchés, dans les lieux publics, afin que personne ne pût échapper à leur vigilance. Ce comportement les rendait terrifiants aux yeux du peuple. C'est ainsi que le mot même de publicain devint synonyme de personne égoïste, dépourvue de sentiment, à la vie déréglée, capable de crimes ou d'actes humiliants, détestée de tous. C'est dans ce sens-là que le Seigneur compare les transgresseurs de la loi de l'Eglise à des païens ou des publicains (Mt.18,17). Dans l'Ancien Testament, il n'y avait rien de plus répugnant pour un serviteur de Dieu qu'un idolâtre, et pourtant un publicain était tout aussi repoussant. Le qualificatif de publicain fut attribué aux démons qui gardent le chenin du ciel, en raison de la similitude des fonctions. Comme fils du mensonge, les démons accusent les âmes humaines, non seulement des péchés qu'elles ont commis, mais également de ceux auxquels elles n'ont jamais été exposées. Ils ont recours à l'invention et à la tromperie, unissant calomnie, impudicité et insolence, afin d'arracher les âmes des mains des anges et d'ajouter de nouveaux prisonniers à la multitude innombrable de l'enfer.
Saint Jean Climaque raconte l'histoire d'un certain Stéphane du mont Sinaï, amant du désert et de l'hésychia, qui passa de nombreuses années dans l'ascèse monastique. Paré des jeûnes, des larmes, et des fleurs d'autres éminentes vertus, ce moine avait atteint un réel repentir. La veille de sa mort, il fut ravi en esprit. Regardant à droite et à gauche de son lit, il voyait des êtres invisibles le torturer. En présence de plusieurs personnes, il disait à haute voix : « Oui, c'est bien ainsi, c'est pour cette raison que j'ai jeûné tant d'années... Non, vous mentez, je n'ai pas fait cela... Oui, c'est tout à fait vrai, mais j'ai pleuré et rempli mon service... Non, vous me calomniez... Oui, c'est exact, je ne sais que dire à cela, mais Dieu est miséricordieux...». C'était en vérité un spectacle terrible et affreux que cette reddition sans pitié de comptes invisibles. Et le plus terrible, c'est qu'on l'accusait de ce qu'il n'avait pas fait ! Hélas ! Cet anachorète hésychaste disait de certains de ses péchés : « je n'ai rien à répondre à cela », bien qu'il eût été moine depuis quarante années, et que Dieu l’eût gratifié du don des larmes. Où était donc la parole d'Ezéchiel : Je te jugerai dans l'état où Je te trouverai (Ez.33,13)? En vérité, il ne pouvait même pas invoquer cela pour se justifier ! Pourquoi ? Gloire à Celui qui Seul le sait ! Et cependant, des gens dignes de foi ont raconté qu'il nourrissait un léopard dans le désert I Tandis qu'il était ainsi sommé de rendre des comptes, il quitta son corps, laissant ses proches dans une incertitude totale au sujet de son jugement (Echelle7,55). Ne me livre pas au bon plaisir de mes oppresseurs, car des témoins injustes se sont levés contre moi et des hommes iniques se sont mentis à eux-mêmes (Ps.26,12), comme il est dit du combat de l'âme humaine avec les esprits invisibles...
Il est indéniable que c'est bien de ces derniers dont parle le saint Apôtre Paul en annonçant le combat avec les esprits méchants qui attend les chrétiens sous les cieux. Cet enseignement existait déjà dans la plus ancienne tradition et dans les prières de l'Eglise. La Très-Sainte Vierge et Mère de Dieu, prévenue par l'Archange Gabriel de l'approche de sa fin, versa des larmes et éleva des prières vers le Seigneur pour que son âme soit libérée des esprits méchants qui errent sous les cieux. A l'heure même de sa mort vénérable, alors même que son Fils descendait vers elle avec des milliers d'anges, elle ne remit pas son âme très sainte entre les mains du Christ sans avoir dit : « Reçois aujourd'hui mon âme dans la paix et garde-moi du lieu obscur, afin que je ne sois confrontée à aucune tentative de satan! » (Synaxaire du 15 août).
Saint Athanase le Grand, patriarche d'Alexandrie, raconte ce qui suit dans la biographie de Saint Antoine le Grand : « Un jour, à l'approche de none, comme il avait commencé à dire les prières avant le repas, Antoine fut soudain ravi par l'Esprit et emporté Sur une hauteur par les anges. Les démons des airs s'opposèrent à cette ascension. Les anges leur en demandèrent la raison, arguant qu'Antoine n'avait pas de péché. Les démons s'efforcèrent d'exposer les péchés qu'Antoine avait commis depuis sa naissance même. Les anges fermèrent la bouche des calomniateurs, disant que ces péchés avaient été rayés par la grâce du Christ. Ils leur réclamèrent ceux qui avaient été commis depuis le début de sa vie monastique, moment où il s'était consacré à Dieu. Les démons prononcèrent alors beaucoup de mensonges insolents. Ces calomnies ne pouvant pas être prouvées, la voie fut libre pour Antoine. Ce dernier revint à lui à l'endroit même où il se tenait pour la prière. Oubliant sa nourriture, il passa la nuit dans les larmes et les gémissements, méditant sur la multitude des ennemis de l'homme, sur le combat engagé contre une telle année, sur les embûches qui jalonnent la voie du ciel et sur les paroles de l'Apôtre : nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre dominations qui se tiennent sous le ciel (Eph.6,12). Sachant que les puissances des airs se préoccupent exclusivement de nous barrer l'accès au ciel, ce même Apôtre dit aussi : prenez toutes les armes de Dieu, afin de pouvoir résister dans le mauvais jour (Eph.6,13), afin que l'adversaire soit confus, n'ayant aucun mal à dire de vous (Tite2,8) ».
Saint Jean Chrysostome remarque que les mourants (quelqu'ait été leur puissance sur cette terre), sont saisis par le trouble, la crainte, la perplexité, en voyant les terribles puissances angéliques et les forces adverses s'approcher pour assister à la séparation de l'âme et du corps. Il nous dit : « De nombreuses prières sont alors nécessaires pour accompagner la traversée de l'espace aérien, ainsi que l'aide conséquente de nombreuses bonnes actions, et la protection des anges. Si nous avons besoin d'un guide pour voyager dans un pays étranger ou une ville inconnue, alors combien plus nécessaires encore dont les guides et les aides qui nous dirigent devant les maîtres de cet éther, ceux qu'on appelle les tortionnaires, les publicains ou les collecteurs d'impôts !».
Parlant au nom des petits enfants chrétiens décédés, Saint Jean Chrysostome dit : « Les saints anges nous ont paisiblement séparés du corps et nous avons librement évité les chefs des puissances des airs. Nous avions des guides de confiance ! Les esprits malins ne trouvèrent pas en nous ce qu'ils cherchaient. Ils ne virent pas ce qu'ils désiraient voir. Devant des corps exempts de souillure, ils furent couverts de confusion. Devant des âmes pures et ignorant le mal, ils eurent honte. Ils ne trouvèrent pas en nous de paroles vicieuses et se turent. Nous passâmes et nous les humiliâmes. Nous traversâmes leurs rangs et ils furent piétinés. Le filet a été brisé et nous avons été délivrés. Béni soit le Seigneur qui ne nous a pas livrés en proie à leurs dents (Ps.123,7&5). Les anges qui nous guidaient se réjouirent quand tout ceci fut accompli, ils se mirent à nous embrasser, nous qui étions justifiés. Ils dirent avec joie : agneaux de Dieu! Nous louons votre venue ici. Le paradis des ancêtres s'est ouvert pour vous. Le sein d'Abraham est à votre disposition. La main droite du Maître vous a reçus. Sa voie vous a appelés à Sa droite. Il vous a regardés avec des yeux bienveillants. Il vous a inscrits dans le livre de vie. Et nous dîmes : Seigneur et juste Juge ! Tu nous as privés des biens terrestres. Ne nous prive pas de Tes biens célestes! Tu nous as séparés de nos pères et de nos mères. Ne nous sépare pas de Tes saints. Les marques du baptême sont restées intactes sur nous » (Homélie du 7ème samedi après Pâque).
Citons de nouveau Saint Macaire le Grand : « Quand tu entends que sous les cieux se trouvent des fleuves de serpents, des gueules de lions, des pouvoirs ténébreux, un feu brûlant qui trouble tous les membres, ignores-tu qu'ils prendront ton âme et l'empêcheront de pénétrer dans les cieux, à moins que tu ne reçoives le gage de l'Esprit Saint au moment de ton départ du corps ? »
Le saint et grand martyr Eustrate endura de terribles tortures, accomplit d'étonnants miracles et fut condamné à la peine capitale pour sa ferme et constante confession du Christ. En approchant de la mort, il éleva vers Dieu sa prière. Il rendit grâce pour la protection divine, pour avoir eu la force de vaincre le diable, l'ennemi invisible, pendant ses souffrances terrestres. Pensant au prochain départ de son âme, il ajouta : « Au moment de quitter son corps maudit et mauvais, mon âme est troublée et dans la peine ! Pourvu que l'ennemi malin ne la surprenne pas et ne la jette pas dans les ténèbres pour les péchés connus et inconnus, péchés que j'ai commis durant cette vie ! Maître, sois miséricordieux envers moi, que mon âme ne voie pas le sombre regard des démons malins, mais qu'elle soit reçue par Tes anges saints et lumineux ! Que Ton saint Nom soit glorifié et que Ta puissance me fasse accéder à Ton tribunal divin ! Lors de mon jugement, que la main du prince de ce monde ne me ravisse pas pour me jeter au plus profond de l'enfer, moi le pécheur ! Présente-toi devant moi pour être mon Sauveur et mon Protecteur ! Ces souffrances corporelles sont une joie pour Tes serviteurs ! ».
Par la grâce du Christ, Saint Georges le Mégalomartyr triompha aussi des terribles souffrances que lui imposa la méchanceté des bourreaux. Il ressuscita un mort et fit tomber les idoles en invoquant le Nom du Seigneur. En arrivant sur les lieux de l'ultime supplice, ses lèvres prononcèrent la prière suivante : « Béni soit le Seigneur mon Dieu qui ne m'a pas livré aux mâchoires de ceux qui me pourchassent, qui n'a pas réjoui par moi mes ennemis, qui a libéré mon âme comme l'oiseau du filet des oiseleurs ! Maître ! Entends-moi à présent ! Présente-toi devant Moi à l'heure de ma mort et libère mon âme de l'astuce du prince des airs, ce terrible adversaire, et des esprits impurs ! Ne tiens pas rigueur à ceux qui ont péché contre moi par ignorance, mais accorde-leur Ton pardon et Ton amour afin qu'ils Te connaissent et prennent part à Ton Royaume avec ceux que Tu as élus I ». Saint Georges et Saint Eustrate souffrirent le martyre au temps de l'empereur Dioclétien, entre 301 et 310.
Saint Niphonte, évêque de Constance à Chypre (grand saint des IIIème et IVème siècles, fêté le 23 décembre) qui vit les mystères, se tenait un jour en prière. Il vit les cieux ouverts et une multitude d'anges descendre sur la terre ou bien monter vers le ciel pour conduire les âmes humaines dans les demeures célestes. Contemplant ce spectacle avec attention, il vit deux anges s'élancer vers les hauteurs, emportant une âme. Lorsqu'ils s'approchèrent de l'épreuve de l'adultère, les démons publicains s'avancèrent et dirent avec colère :
- Cette âme est à nous ! Comment osez-vous l'emporter et nous éviter, puisqu'elle est à nous ?
- Pour quelle raison dites-vous qu'elle est à vous ?
-Jusqu'à sa mort, elle a péché, se souillant non seulement par des péchés conformes à la nature, mais aussi par des péchés contraires à la nature ! De plus elle jugeait le prochain, et pire encore, elle mourut sans repentir ! Qu'avez-vous à répondre à cela ?
- En vérité, nous ne vous croirons pas, pas plus que votre père satan, tant que nous n'aurons pas questionné son ange gardien.
Une fois interrogé, l'ange gardien répondit :
- C'est exact, cet homme a beaucoup péché, mais dès qu'il est tombé malade, il s'est mis à pleurer et a confessé ses fautes à Dieu. Dieu l'a-t-il pardonné? Lui seul le sait ! A Son juste tribunal, Lui seul a pouvoir et gloire !
Alors les anges conduisirent l'âme devant les portes célestes sans tenir compte de l'accusation des démons. Le bienheureux vit ensuite une autre âme élevée par les anges. Se précipitant vers eux les démons criaient :
- Pourquoi emportez-vous les âmes à notre insu ? Celle-ci aime l'or, elle est adultère et querelleuse, elle a commis des actes de brigandage !
- Nous savons avec certitude qu'après tout cela, elle a pleuré, soupiré, s'est confessée et a donné des aumônes : c'est pour cela que Dieu lui a accordé le pardon !
- Si cette âme mérite la miséricorde de Dieu, prenez les pécheurs du monde entier, nous n'avons plus rien à faire ici !
- Tous les pécheurs qui confessent leurs péchés avec larmes et humilité recevront le pardon de la miséricorde divine. Ceux qui meurent sans repentir seront jugés par Dieu !
Ayant ainsi couvert les démons de honte, ils s'en allèrent. Par la suite, le saint vit s'élever l'âme d'un homme aimant Dieu, pur, miséricordieux, charitable envers tous. Les démons se tenaient à distance en grinçant des dents, tandis que les anges franchissant les portes célestes pour venir à sa rencontre, disaient : « Gloire à Toi, Christ Dieu, car Tu n'as pas livré cette âme aux mains des ennemis, et Tu l'as sauvée de l'enfer souterrain ! ».
Le bienheureux Niphonte vit aussi les démons entraîner une âme en enfer. Il s'agissait de l'âme d'un esclave que son maître affamait et battait et qui, incapable de supporter les souffrances, s'était étranglé sous l'instigation du diable. L'ange gardien regardait de loin et pleurait amèrement, tandis que les démons se réjouissaient. Sur les entrefaites, l'ange gardien reçut l'ordre de se rendre à Rome pour prendre la charge d'un nouveau né que l'on venait de baptiser.
Le saint vit encore une âme que les anges Portaient dans les airs et que les démons avaient reprise à la quatrième épreuve pour la précipiter dans l'abîme. Il s'agissait de l'âme d'un homme s'adonnant à l'adultère, à la magie et au pillage, et qui mourut sans repentir.
Saint Syméon le fol-en-Christ (saint du VIème siècle, fêté le 21 juillet), qui avait atteint les sommets de la perfection chrétienne, dévoila l'approche de sa mort au diacre Jean qui avait vu les mystères avec lui. Il lui fit part d'une révélation d'en-haut concernant la grande rétribution qui l'attendait au ciel : « Je ne vois rien en moi qui mériterait une rétribution céleste, à moins que le Seigneur ne souhaite, par l'effet de Sa grâce, m'accorder Sa miséricorde gratuitement. Sache que tu seras toi aussi bientôt enlevé d'ici. Selon tes forces, préoccupe-toi donc de ton âme pour être en mesure de traverser sans encombre le domaine des esprits aériens et échapper à la main du prince des ténèbres ! Mon Seigneur sait qu'une grande tristesse et une grande crainte s'emparent de moi, qui ne me quitteront pas tant que je n'aurai pas évité ces lieux terribles où sont éprouvées toutes les actions et toutes les paroles humaines ».
Le bienheureux Jean le Miséricordieux, patriarche d'Alexandrie (fêté le 19 décembre, mort dans la seconde rnoitié du VIIème siècle, après l'occupation de l'Egypte par les musulmans), parlait constamment de la mort et du départ de l'âme, à la suite d'une révélation de Saint Syméon le Stylite : « Lorsque l'âme quitte le corps et commence à s'élever vers le ciel, les phalanges des démons l'assaillent et la soumettent à de nombreuses difficultés et questions. Ils l'interrogent sur le mensonge, la calomnie, la fureur, l'envie, la colère, la rancune, les jurons, l'indocilité, l'usure, la cupidité, l'ivrognerie, la gloutonnerie, les mauvaises pensées, la magie, la haine du frère, le meurtre, le vol, l'inclémence, la fornication et l'adultère. Pendant son cheminement vers le ciel, les anges les plus saints ne peuvent lui porter secours. Ne l'aideront que son repentir, ses bonnes actions, et par-dessus tout, ses aumônes. Si, par négligence, nous n'avons pas apporté de repentir ici-bas, les aumônes pourront nous libérer de la violence des épreuves des démons. Frères, sachant cela, craignons l'heure amère de notre rencontre avec les durs et inflexibles publicains, l'heure où nous serons perplexes quant à ce que nous devrons répondre aux bourreaux. Repentons-nous dès maintenant de tous nos péchés selon nos possibilités, distribuons des aumônes qui pourront nous conduire de la terre vers le ciel et nous soustraire à l'obstacle des démons. Leur haine à notre égard est grande, la frayeur et la calamité nous attendent dans les airs ».
Saint Syméon le Stylite qui vécut au Mont Admirable, a transmis par l'intermédiaire du patriarche Jean des renseignements sur les épreuves et le destin d'outre-tombe du chrétien. En premier lieu, il révèle que l'Esprit Saint lui a appris que peu nombreux furent ceux qui cherchaient le salut de son temps, et peu nombreux aussi ceux qui demeuraient entre les mains des anges. Il décrit ensuite l'amour des anges qui reçoivent les âmes justes et non souillées (Comme ils les magnifient, les élèvent en chantant au-dessus de l'échelle des épreuves, et repoussent les forces ennemies). Enfin, il enseigne que l'âme pécheresse n'a pas accès aux espaces aériens élevés, et que le diable a tout le loisir de l'accuser. Il la dispute aux anges qui l'accompagnent, expose les péchés en raison desquels elle lui revient, et établit l'insuffisance des vertus qui justifie les difficultés de l'ascension et l'impossibilité du salut.
Dans sa lettre à Saint Jean Climaque, Saint Jean de Raïthou mentionne lui aussi les princes des airs, maîtres du monde, esprits de méchanceté. Il exprime sa soif d'instructions spirituelles si utiles à l'âme. Il implore le Flambeau du Sinaï de guider les moines vers les portes célestes pour qu'ils échappent aux pouvoirs ténébreux qui jalonnent l'ascension du ciel. Répondant par son célèbre traité, Saint Jean Climaque y décrit notamment des moines déchus animés d'un profond repentir qui se tiennent en gémissant devant l'interrogatoire aérien à propos duquel ils n'ont aucune certitude et disent humblement : notre âme serait entrée dans un flot irrésistible... (Ps.123,4), celui des esprits aériens !
Dans son testament, Saint Isaïe, ermite du Verne siècle, recommande d'avoir quotidiennement la mort devant les yeux et de se préoccuper de la façon d'accomplir son départ du corps pour éviter les pouvoirs des ténèbres postés dans les espaces aériens. Il dit : « Pense à la joie de l'âme qui s'est livrée au service de Dieu et a effectué ce service ! Lors de son départ du monde, ses œuvres accompliront l'exploit pour elle. La voyant libérée des pouvoirs des ténèbres, les anges se réjouiront. Quand elle quittera le corps, les anges l'accompagneront, et les puissances des ténèbres sortiront à sa rencontre, cherchant à la retenir, et la questionneront pour trouver en elle quelque chose qui leur appartienne. Ce ne seront pas les anges qui résisteront aux ennemis, ce sont les œuvres accomplies qui la protégeront et les empêcheront de la toucher. Si les œuvres vainquent, les anges chanteront un chant de louange et conduiront l'âme avec allégresse devant la face de Dieu. A cette heure, elle oubliera son labeur et tout ce qui a trait à la vie terrestre. Efforçons-nous pendant ce court laps de temps de faire le bien et de garder notre âme inviolée par le mal, afin qu'il nous soit toujours possible d'être sauvés des mains des princes rusés et impitoyables qui nous attendent. Bienheureux celui chez qui on ne pourra rien trouver qui leur appartienne Sa joie, son allégresse, sa paix et sa couronne surpasseront toute mesure ».
Dans la communauté d'Abba Séridos vivait un moine qui approchait de la mort. Il s'adressa à l'ancien Barsanuphe, le grand saint hésychaste qui vivait à l'époque (Vème-VIème siècles) en reclus dans le monastère, afin qu'il accompagnât son âme dans son voyage aérien. Saint Barsanuphe répondit : « Frère ! Je te remets au Christ qui a bien voulu mourir pour nous, au Maître du ciel, de la terre et de tout ce qui vit, afin qu'Il amoindrisse devant tes yeux la crainte de la mort et fasse en sorte que l'ascension de ton âme ne connaisse point d'obstacle » .
Le saint Abba Dorothée, membre de cette communauté d'Abba Séridos, écrit dans une de ses épîtres : « En cas d'insensibilité, il est utile de lire fréquemment les Divines Ecritures et les homélies des Pères théophores qui attendrissent l'âme, de se souvenir du terrible jugement de Dieu, du départ de l'âme du corps, des terribles puissances qui la rencontrent, avec lesquelles elle a fait le mal dans cette vie brève et malheureuse ».
Saint Jean de Carpathos consolait les moines des Indes qui supportaient les persécutions des ennemis visibles et invisibles et menaçaient de tomber dans l'abîme du désespoir en leur disant : « Combattant et dénigrant, l'ennemi, ce pénible et terrible calomniateur des péchés commis, attaque avec insolence l'âme sortie du corps. Que l'âme qui aime Dieu et Lui est restée fidèle ne soit pas terrifiée par ces attaques et ces menaces, quand bien même aurait-elle été blessée par de nombreux péchés. Fortifiée par le Seigneur, enthousiaste et joyeuse, soutenue par les Saintes Puissances qui l'instruisent, gardée par la lumière de la foi, elle résistera courageusement au malin et lui dira : quoi de commun entre toi et moi, étranger à Dieu ? Quoi de commun entre toi et moi, évadé du ciel, esclave rusé ? Tu n'as pas de pouvoir sur moi. C'est le Christ, le Fils de Dieu, qui a pouvoir sur moi. C'est devant Lui que j'ai péché et c'est à Lui que je rendrai compte, avec Sa Sainte Croix comme gage de miséricorde et de salut. Fuis loin de moi, destructeur ! II n'y a rien de commun entre toi et les serviteurs du Christ ! Si l'âme parle avec un tel courage, le diable s'enfuit en criant qu'il ne peut résister au Nom du Christ. L'âme s'envole alors plus haut que l'ennemi et les anges divins la conduisent en un lieu qui correspond à sa réussite spirituelle ».
« Lorsqu'après la mort, dit saint Hésychius : l'âme s'envole vers les portes célestes en ayant le Christ avec elle et en elle, elle n'a rien à craindre de ses ennemis à qui elle tiendra tête courageusement. Mais qu'elle ne cesse pas avant son départ de crier jour et nuit vers le Seigneur Jésus-Christ ! Il la vengera bientôt, selon la promesse divine et véridique de la parabole du juge inique. En vérité, je vous le dis, Il la vengera tant dans cette vie qu'après son départ du corps. L'heure de la mort fond sur nous sans qu'il soit possible de l'éviter. Oh ! Si seulement le prince de ce monde et de l'air qui doit nous accueillir pouvait considérer nos transgressions comme insignifiantes et ne pas trouver de justes occasions de nous accuser ! Sinon, nous pleurerons en vain. Le serviteur qui, ayant connu la volonté de son maître, n'a pas agi selon cette volonté sera battu d'un grand nombre de coups (Lc12,47). L'aveugle de naissance ne voit pas la lumière. De la même façon, celui qui ne demeure pas vigilant ne perçoit pas le somptueux rayonnement de la grâce et ne se libérera pas des actions, paroles et pensées malignes et sacrilèges. Un tel homme ne se libérera pas des princes de l'enfer lors de son décès ».
« La douceur de l'âme qui se sépare du corps après avoir été prévenue de son salut est ineffable, dit saint Théognoste. Elle quitte le corps comme un vêtement. Ayant la ferme certitude de recevoir ce qu'elle a en fait déjà reçu lors de la promesse, elle dépose le corps paisiblement et sans tristesse et s'en va vers l'ange calme et lumineux venu d'en haut la chercher. En sa compagnie elle traverse sans encombre l'espace aérien, sans être aucunement troublée par les esprits malins. Elle s'élève avec joie et audace, offrant à Dieu des exclamations de gratitude. Elle atteint le lieu où elle pourra adorer son Créateur : on y prononce la décision la concernant, qui la placera avec ceux qui l'égalent en vertu, jusqu'à la résurrection générale.
Quand bien même tu aurais été digne de voir comme dans un miroir l'état bienheureux qui t'attend après la mort, grâce à l'état permanent de prière pure qui unit ton esprit à Dieu, quand bien même tu aurais été digne de cela pour t'être voué à l'Esprit et avoir acquis le Royaume Céleste en dedans de toi, avec pour témoignage une perception claire et précise de l'âme, ne supporte pas de te séparer de la chair sans avoir été prévenu de l'approche de la mort ! Prie pour cela avec zèle et garde bon espoir de recevoir cette information, éventuellement à l'approche de la fin, si cela est utile. Prépare-toi constamment à la mort, afin de pouvoir traverser l'espace aérien en évitant les esprits malins, afin d'entrer dans les cercles célestes sans crainte et même avec hardiesse, d'être incorporé dans les rangs angéliques, d'agrandir par ta présence le chœur des élus et des saints, et de voir Dieu autant qu'une telle vision puisse être accessible ».
La perception spirituelle dont parle Saint Théognoste est, dans son absolue authenticité, une révélation. Elle est l'effet de la descente de la grâce divine sur le pécheur repentant et perplexe, qui se retrouve ainsi dans les bras spirituels et paternels du Seigneur. Une vie nouvelle apparaît dans l'âme, dont elle ne pouvait se faire aucune idée auparavant. Cette vie la libère de la violence des esprits malins et des passions. Elle modifie l'homme entièrement pour l'unir avec Dieu, l'entraîne dans une merveilleuse prière dans laquelle, sous l'instigation de l'Esprit Saint, il se met à crier vers Dieu. Tous les os d'un tel homme diront, dans une ineffable glorification spirituelle et dans l'action de grâce : Seigneur, Seigneur, qui est comme Toi, pour délivrer le pauvre de la main du plus fort, le pauvre et l'indigent de ceux qui les dépouillent? (Ps.34,10). Cette perception spirituelle est tellement forte qu'après avoir embrasé l'homme, elle lui enlève toute sympathie pour autre chose. Elle est en bref l'établissement dans l'homme du Royaume des Cieux. Celui qui a senti cela ne vit plus pour lui-même mais pour Dieu (2Cor.5,15). Il se tourne entièrement vers Lui et L'a en lui. Un tel sentiment existe aussi chez ceux qui ont été victimes du leurre et de l'illusion démoniaque, mais il se distingue de l'action de la grâce par ses fruits.

« Reprends-toi, mon âme se dit humblement le moine Evagre et demande-toi comment tu supporteras ta séparation soudaine d'avec le corps, quand les anges terribles viendront te chercher et s'empareront de toi à l'heure où tu ne les attends pas ! Par quelles œuvres te feras-tu précéder dans les airs lorsque tes ennemis ariens commenceront à te questionner sur tes actes? ».
C'est ainsi que les saints parlaient et ressentaient les choses. Ils avaient exploré et compris les profondeurs de la chute, ils avaient exploré et compris le pouvoir des démons sur l'homme, pouvoir consécutif à la chute.
Georges, le reclus de Zadonsk, rapporte un événement qui nous est presque contemporain. L'archimandrite Barsanuphe de Zadonsk resta sans connaissance trois jours et trois nuits. Son âme vécut pendant ce temps les épreuves aériennes, elle fut questionnée pour tous les péchés commis depuis sa jeunesse, et elle entendit la voix de Dieu lui dire : « Par les prières de la Très Sainte Mère de Dieu, du saint martyr Mocius et de saint André le Stratilate, tes péchés te sont remis et le temps pour te repentir t'est octroyé! ».
L'enseignement sur les épreuves et sur la localisation de l'enfer et du Paradis est diffusé tout au long des offices de l'Eglise Orthodoxe. L'Eglise se charge de le rappeler à ses enfants, afin d'enraciner dans leur cœur une crainte salutaire pour l'âme et de préparer cette dernière à un heureux passage vers la vie éternelle.
Dans le canon d'action de grâce au Seigneur Jésus-Christ et à la Mère de Dieu, qu'on utilise pour le décès de tout orthodoxe (petit euchologe), on lit :
- Lorsque je quitterai la terre, accorde-moi d'éviter sans difficulté le prince des airs, le voleur, le bourreau, celui qui est placé sur la voie effrayante comme un injuste inquisiteur ! (Ode4,Trop.4)
- Rends-moi digne de pouvoir fuir les armées des barbares incorporels, de m'élever au-dessus des abîmes aériens jusqu'au ciel ! (Ode8,Trop.2)
- Chasse loin de moi le prince de ce monde, les chefs des épreuves amères ! (Ode8,Trop.3) .
Dans les prières suivant les cathismes du psautier, on lit les paroles suivantes :
- Ô, mon Seigneur, mon Seigneur ! Donne-moi des larmes de componction pour que je puisse T'implorer de me purifier de tout péché avant la fin, car après m'être séparé du corps, je dois passer par un lieu effrayant et terrible où une multitude de démons ténébreux et inhumains viendront à ma rencontre ! (après le IVème cathisme)
- Donne-moi l'intégrité par Ta perfection, tire-moi de cette vie, afin que je traverse sans embûche les principautés et les puissances des ténèbres, et que par Ta grâce, je voie moi-aussi la beauté indicible de Ta gloire inaccessible ! (après le 17ème cathisme)
Dans l'office de l'Acathiste à la Mère de Dieu, on lit :
- Ô ! Mère du Roi du ciel et de la terre ! Obtiens le pardon de tous mes péchés, et l'amendement de ma vie ! Lors de ma fin, accorde-moi de dépasser sans trouble les ennemis aériens ! (prière avant les kondakia et ikoi)
- Par Toi (Mère de Dieu) les morts sont animés, car Tu as donné naissance à la Vie hypostasiée. Ceux qui étaient muets retrouvent l'éloquence, les lépreux sont purifiés, les maux sont chassés, la multitude des esprits aériens est vaincue ! (Ode8,Trop.4)

L'Octoèque offre les prières suivantes à la Mère de Dieu
- A l'heure de ma mort, Ô Vierge, sauve-moi des mains du démon, du jugement, des tergiversations, des inquisitions effrayantes, des épreuves amères, du prince cruel et de la condamnation éternelle ! (vendredi, ton4, ode8)
- Mère de Dieu, sauve-nous de tout danger et de l'éternelle condamnation ! (jeudi, ton4, ode6)
- Ô Vierge ! A l'heure de ma mort, libère-moi des mains des démons, de la condamnation, des comptes à rendre, de l'effrayante investigation, des épreuves amères, du prince féroce et du feu éternel ! (mardi, ton4, ode8)
- Souveraine et Mère du Rédempteur, assiste-moi à l'heure de la mort, car les esprits aériens me tortureront pour les actes que m'auront suggérés les pensées irraisonnables (Vendredi, ton3, ode6).
- Lorsque mon âme rompra son union avec le corps, assiste-moi, Ô Souveraine, détruis le conseil des ennemis incorporels, brise les mâchoires qui chercheront à me dévorer sans pitié, et fais en sorte que j'évite les entraves des princes des ténèbres qui se trouvent dans les airs (samedi, ton8, ode9)
Dans le rituel de la séparation de l'âme et du corps destiné aux mourants qui souffrent longtemps, on lit :
- Le temps de ma vie s'est envolé en fumée; devant moi se sont présentés les anges qui cherchent impitoyablement mon âme misérable ! (Ode l,Trop.2&3)
- Voilà que s'est présentée une multitude d'esprits malins qui tient la cédule de mes péchés, vociférant et cherchant impudiquement ma pauvre âme !
- Ayez pitié de moi, saints anges du Dieu omniprésent, et soustrayez-moi à toutes les épreuves malignes ! (Ode7,Trop.2)
Dans le canon à l'ange gardien, on trouve :
- Lorsque mon âme se séparera du corps, que le déshonneur et la honte couvrent les visages ignobles, honteux et ténébreux des ennemis ! (ode6)
- Quand mon esprit devra me quitter, puissé-je te voir à la droite de mon âme misérable, chassant les ennemis cruels qui chercheront à s'emparer de moi ! (ode9)
- Je te supplie d'être mon défenseur, ô mon gardien, et de combattre pour moi invisiblement quand je passerai les épreuves du féroce prince de ce monde ! (ode9)
La deuxième prière à Saint Nicolas de la Laure des grottes de Kiev dit :
« Lors de la sortie de mon âme, aide le misérable que je suis, supplie le Seigneur et Créateur de toutes les créatures de me libérer des épreuves des airs et de la souffrance éternelle ! » On retrouve dans la prière à Saint Serge de Radonège et dans les prières adressées à d'autres saints la demande d'être soustrait aux épreuves aériennes.
Ayant senti que sa maladie lui causait un épuisement extrême, Saint Théodose des Grottes de Kiev se coucha sur son lit et dit : «Que la volonté de Dieu soit faite ! Que les choses aient lieu selon ce qu'Il a voulu pour moi! Mais je Te prie, mon Seigneur Jésus-Christ, d'être miséricordieux pour mon âme, qu'elle ne rencontre pas la malignité des esprits adverses, qu'elle soit reçue par Tes saints anges afin qu'ils lui fassent traverser les épreuves obscures et la conduisent vers la lumière de Ta miséricorde ! ». .
Saint Dimitri de Rostov priait ainsi : « Lorsque viendra l'heure terrible où mon âme se séparera de mon corps, alors, mon Rédempteur, reçois-la dans Tes mains et préserve-la de tout malheur ! Qu'elle ne voit pas le regard sombre des démons malins, mais qu'elle passe, saine et sauve, à travers toutes les épreuves ! »
Dans le traité de théologie orthodoxe de S.E. Macaire (tome5, p86, édit.1853), on trouve la remarque suivante. : « La référence incessante, permanente et générale à l'enseignement sur les épreuves dans l'Eglise, et particulièrement chez les maîtres du IVème siècle, montre sans contestation possible qu'il fut transmis par les maîtres des siècles précédents et a comme fondement la tradition apostolique ».