lundi 5 janvier 2009

VIE DU SAINT MARTYR PANTELEIMON



Sous le règne de l'impie Maximien (305-311), ce cruel bourreau des chrétiens, alors que les ténèbres de l'impiété païenne recouvraient presque tout l'univers, que l'on déclenchait partout de grandes persécutions où une multitude de confesseurs allaient au martyre pour le très-saint Nom de Jésus-Christ, la ville de Nicomédie en Bithynie offrit au Christ les souffrances du saint et grand martyr Pantéléimon.
Ce très glorieux martyr naquit à Nicomédie d'un père riche et célèbre du nom d'Eustorgue; ce dernier était païen et farouchement attaché à l'idolâtrie. En revanche, Euvule, sa mère, avait été instruite dans la foi chrétienne par ses ancêtres et servait le Christ avec ferveur. C'est ainsi qu'unis par la chair, les époux étaient séparés par l'esprit: alors que le mari apportait des sacrifices aux faux dieux, l'épouse apportait ses louanges au seul vrai Dieu. L'enfant qui naquit reçut le nom de Pantoléon, c'est-à-dire « en tout semblable au lion », car on attendait de lui qu'il eût un courage semblable à celui de l'imposant animal. Ce n'est que plus tard qu'on donna à l'adolescent le nom de Pantéléimon, c'est-à-dire « le tout miséricordieux », car, sans rétribution, il offrait sans distinction à tous ceux qui l'approchaient, pour les malades la guérison, et des aumônes aux pauvres, qu'il comblait de bienfaits en puisant dans la fortune héritée de son père.
Dès sa plus tendre enfance, sa mère l'éduqua dans la piété chrétienne, lui enseignant la connaissance du seul vrai Dieu qui vit dans les cieux, notre Seigneur Jésus-Christ. Elle tenait à ce qu'il crût en Lui et Lui fût agréable par ses bonnes oeuvres, le détournant ainsi du polythéisme païen. L'enfant écoutait avec attention les instructions de sa mère et les assimilait autant que son jeune âge le lui permettait. Mais hélas ! Quelle perte cruelle dut subir l'adolescent, lorsque cette mère, bon guide de ses jeunes années, partit vers le Seigneur, avant qu'il n'eût atteint l'âge de raison d'un homme fait ! C'est ainsi que Pantoléon tomba facilement dans les erreurs paternelles, qui l'amenait sacrifier aux idoles, l'affermissant dans l'impiété païenne.
Par la suite, devenu jeune homme, il fut placé dans une école de grammaire où il réussit avec succès tous les examens de philosophie païenne. Son père le confia ensuite à un médecin nommé Euphrosyne, pour qu'il apprît l'art de guérir dans une école de médecine. L'esprit du jeune homme était vif, il assimilait facilement ce qu'on lui enseignait, et il en vint bientôt à surpasser tous ses camarades et à égaler son maître. Il se distinguait de surcroît par sa tenue, son éloquence, sa beauté, et faisait une très forte impression sur tous. Même l'empereur Maximien, qui vivait à l'époque à Nicomédie, le connaissait. Mais c'était aussi le moment où les chrétiens étaient livrés au supplice. Maximien en brûla une fois vingt mille dans une église. Il fit également mettre à mort l'évêque Anthyme le jour de la nativité du Christ.
Euphrosyne se rendait souvent dans les appartements impériaux pour délivrer des soins médicaux, car il avait en charge toute la cour impériale, jusqu'au bourreau. Pantoléon l'y accompagnait, comme un jeune disciple suivant son maître, et tous étaient surpris par la beauté et l'intelligence du jeune homme. En le voyant l'empereur demanda: « d'où vient-il et de qui est-il le fils? ». Ayant reçu la réponse à sa question, l'empereur ordonna au maître d'enseigner à son disciple l'art médical le plus rapidement possible, car il avait le désir de garder toujours à ses côtés ce jeune homme tellement digne de se tenir devant l'empereur et de le servir. A cette époque, Pantoléon était déjà devenu un homme fait.
En ces temps-là vivait à Nicomédie un presbytre nommé Hermolaüs, qui se cachait dans une humble maison par crainte des impies, en compagnie de quelques pieux chrétiens. Il se trouvait que le chemin qui conduisait Pantoléon de sa maison à celle de son maître passait devant la demeure d'Hermolaüs. Voyant souvent le jeune homme passer devant sa fenêtre, Hermolaüs comprit en observant son visage et son regard qu'il serait un jour un vase élu de Dieu. Un jour, il décida d'aller à la rencontre du jeune homme, le priant de bien vouloir entrer dans sa demeure. Pantoléon, qui était doux et obéissant, accepta l'invitation et s'assit auprès du vieillard. Ce dernier le questionna sur ses origines, sur ses parents, sur son mode de vie et sur sa foi. Le jeune homme raconta tout en détails, notamment que sa mère défunte était chrétienne, alors que son père, encore en vie, adorait de nombreux démons en accord avec les lois païennes.
-Et toi, cher enfant ! De quel côté voudrais-tu être ? A quelle foi souhaites-tu prendre part ? A celle de ton père ou à celle de ta mère ?
-Lorsque ma mère était en vie, elle m'enseignait sa foi que j'aimais beaucoup. D’un autre côté, mon père m'incite vigoureusement à suivre les lois païennes, et désire m'établir au palais dans les rangs des proches et nobles serviteurs et soldats de l'empereur.
-Et quelle science ton maître t'enseigne-t-il ?
-La science d'Asclépiade, d'Hippocrate et de Galien, ce qui correspond exactement au désir de mon père. Mon maître pense qu'en assimilant cette science, je pourrai facilement guérir les gens de toutes les maladies.
Trouvant dans ces dernières paroles le prétexte à un entretien utile, Hermolaüs commença à semer dans le coeur du jeune homme, comme dans une terre fertile, les bonnes graines de la Parole de Dieu.
-Crois-moi, mon bon enfant ! Je ne te dirai que la vérité: toute la science et tout l'art d'Asclépiade, d'Hippocrate et de Galien sont choses bien insignifiantes. Elles ne peuvent aider que très peu ceux qui y recourent. Les dieux, que l'empereur Maximien, ton père et les autres païens adorent, sont vains; ils ne sont que fables destinées à tromper les faibles d'esprit. Le seul Dieu, le Dieu tout-puissant, c'est Jésus-Christ. Si tu crois en Lui, tu pourras guérir tous les maux, à la seule invocation de Son très-saint Nom. Il rendait la vue aux aveugles, purifiait les lépreux, ressuscitait les morts. D'une seule parole, Il purifiait les gens de ces démons que les païens adorent tant. Non seulement Sa Personne, mais Ses vêtements mêmes apportaient la guérison: c'est ainsi qu'une femme qui perdait du sang depuis douze années fut guérie immédiatement au seul contact de la frange de Son vêtement. Qui pourrait raconter en détails toutes les merveilles qu'Il a accomplies ? De même qu'on ne peut dénombrer les grains de sable, les étoiles du firmament, ni les gouttes d'eau de la mer, on ne peut ni énumérer les miracles de Dieu, ni mesurer Sa grandeur. Aujourd'hui encore, Il est une aide puissante pour Ses serviteurs, une consolation pour les affligés, la guérison des malades, le rempart devant les calamités, l'affranchissement de tous les malheurs venant de l'ennemi. Il n'attend pas d'être prié pour agir, mais Il prévient toute prière et tout mouvement du coeur. Il donne aussi le pouvoir de guérir à ceux qui L'aiment et Il leur accorde le don d'opérer des miracles encore plus grands que les Siens. Et en plus de tous ces bienfaits, il offre la vie éternelle dans la gloire éternelle du Royaume Céleste.
Pantoléon accepta le discours d'Hermolaüs comme un discours véridique et digne de foi, et le garda dans son coeur. Son esprit s'y plongea avec joie. Il avait en effet souvent entendu de telles paroles de la bouche de sa mère et souvent aussi, il l'avait vue prier le Dieu dont Hermolaüs lui parlait. A partir de ce moment, Pantoléon vint chaque jour chez le vieillard pour jouir de ses enseignements divinement inspirés, s'affermissant dans la connaissance du seul vrai Dieu. En sortant de chez son maître Euphrosyne, il ne rentrait jamais chez lui sans avoir rendu visite au vieillard et sans s'être abreuvé à la source de ses paroles si utiles pour l'âme.
Un jour, il advint que sur le chemin du retour, il aperçut sur le bord de sa route un enfant mort des suites de la morsure d'une énorme vipère, qui était encore allongée près de sa victime. Devant cet horrible spectacle, Pantoléon recula de frayeur, puis, s'étant ressaisi, il se dit: « Le moment est venu pour moi de m'assurer que tout ce qu'Hermolaüs m'a dit est bien vrai ». Il regarda le ciel et dit: « Seigneur Jésus-Christ, bien que je sois indigne de T'invoquer, si Tu veux que je devienne Ton serviteur, manifeste Ta puissance, et fais qu'en Ton Nom cet enfant s'anime et que la vipère crève ! ». L'enfant se leva sur le champ, comme s'il sortait du sommeil, et la vipère se fendit en deux. Pantoléon crut alors pleinement au Christ et, tournant ses yeux charnels et ses yeux spirituels vers le ciel, il rendit grâce à Dieu qui l'avait fait sortir des ténèbres vers la lumière de la connaissance, en versant d'abondantes larmes de joie. Il se rendit en hâte chez le saint presbytre Hermolaüs, lui raconta ce qui était arrivé et tomba à ses pieds en demandant le baptême. Le vieillard sortit de la maison et s'en alla en compagnie du jeune homme voir la vipère morte: l'ayant vue, il rendit grâce à Dieu pour ce miracle qui avait amené Pantoléon à Le connaitre. De retour chez lui, il baptisa le jeune homme au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, célébra la liturgie dans la maison, et fit communier le nouveau chrétien aux divins mystères du Corps et du Sang du Christ.
Après son baptême, Pantoléon resta sept jours auprès du vieillard, recevant l'enseignement que lui communiquait la grâce du Christ par la bouche d'Hermolaüs. Il abreuvait son âme à la source d'eau vive, pour qu'elle puisse produire une abondante récolte de fruits spirituels. Le huitième jour, il rentra chez lui et rencontra son père.- Où étais-tu pendant tous ces jours, mon fils ? Je me suis inquiété pour toi.
-J'étais avec mon maître dans le palais de l'empereur; nous soignions un malade que l'empereur aime beaucoup, et nous ne l'avons pas quitté tant que la santé ne lui a pas été rendue.
En prononçant ces paroles, le saint ne mentait pas, mais exposait les faits de manière allégorique et mystérieuse. Son « maître » était pour lui le saint presbytre Hermolaüs, le « palais de l'empereur », la chambre secrète où s'accomplissaient les saints mystères, et le « malade », sa propre âme que le Roi Céleste aimait tant qu'Il la soigna de Ses traitements spirituels sept jours durant.
Lorsque, le lendemain, Pantoléon se rendit chez son maître Euphrosyne, celui-ci lui demanda:
-Où étais-tu pendant tant de jours ?
-Mon père a acheté une propriété dont je suis allé prendre possession: je me suis attardé pour l'examiner attentivement et dans les moindres détails, car elle a été achetée à bon prix.
Il parlait en réalité du saint baptême et des autres sacrements de la foi chrétienne qu'il avait reçue, et qui étaient tous de grand prix: ce qui a été acquis par le Sang même du Christ surpasse en effet toutes les richesses. Euphrosyne cessa alors de le questionner. Saint Pantoléon était rempli de la grâce divine et gardait précieusement en lui-même le trésor de la sainte foi. Il était très préoccupé par son père. Comment le faire sortir des ténèbres de l'idolâtrie et le conduire jusqu'à la lumière de la connaissance du Christ ? Il se mit à s'entretenir chaque jour avec lui, utilisant des paraboles et lui posant des questions.
-Père ! Pourquoi les dieux qui ont été faits debout ne s'assoient-ils jamais, et ceux qui ont été faits assis ne se lèvent-ils jamais ?
-Cette question n'est pas très claire et je ne sais pas quoi répondre à cela.
Proposant constamment à son père des problèmes semblables, le saint l'obligea à douter des dieux et à comprendre petit à petit le mensonge de l'idolâtrie. Son père cessa alors d'apporter des offrandes quotidiennes aux idoles comme il le faisait auparavant, puis il les méprisa et cessa de les adorer. Pantoléon se réjouit d'avoir au moins semé le doute dans l'esprit de son père à propos du paganisme, même s'il n'avait pas réussi à l'en détourner complètement. Plus d'une fois, il eut envie de briser les idoles qu'on trouvait à foison dans la maison, mais il se retenait, d'une part pour ne pas blesser son père que le commandement de Dieu demande d'honorer, d'autre part parce qu'il attendait le jour où, ayant connu le seul vrai Dieu, son père déciderait de les briser lui-même de sa propre main.
Or il advint un jour qu'on amena à Pantoléon un aveugle qui souhaitait être guéri:
-Je t'en prie, aie pitié de moi, aveugle que je suis, privé de la précieuse lumière ! Tous les médecins de la ville m'ont soigné sans que j'en reçusse aucun profit. J'y ai laissé tous mes biens, et même les dernières lueurs que je pouvais encore percevoir. J'ai dépensé beaucoup d'argent chez eux, pour n'en tirer que nuisance et perte de temps !
-Si tu as distribué tout ton bien chez ces médecins, sans recevoir de soulagement, comment me rétribueras-tu si tu retrouves la vue ?
-Le peu qui me reste, je te le donnerai volontiers !
-Le don de la vue qui te dévoilera la lumière, te sera accordé par le Père de la lumière, le seul vrai Dieu, à travers moi, Son indigne serviteur. Ce que tu m'as promis, donne-le aux pauvres, et non à moi !
-Mon fils, dit alors Eustorgue, n'entreprends pas ce que tu ne pourras pas réaliser, car tu seras ridiculisé ! Comment pourrais-tu réussir là où de meilleurs médecins que toi ont échoué ?
-Aucun de ces médecins ne connaît comme moi le remède à employer dans ce cas précis; il y a en effet une grande différence entre eux et le Maître qui m'a enseigné cette thérapie.
-J'ai pourtant entendu dire que ton maître Euphrosyne a soigné cet aveugle et n'a rien pu faire.
-Attends un peu, mon père, et tu verras la force de ma médication.
En prononçant ces paroles, il toucha des doigts les yeux de l'aveugle en disant: « Au Nom de mon Seigneur Jésus-Christ, qui éclaire les aveugles, recouvre la vue ! ». Aussitôt les yeux de l'aveugle s'ouvrirent et il commença à voir. Il crut dès cet instant au Christ, ainsi que le père de Pantoléon, et ils furent bientôt baptisés par le presbytre Hermolaüs. La grâce et la puissance du Christ les remplirent d'une grande joie spirituelle.
Eustorgue brisa alors toutes les idoles de sa maison, avec l'aide de son fils. Après les avoir mises en pièces, ils les jetèrent dans un fossé profond et les recouvrirent de terre. Peu de temps après ces événements, Eustorgue partit vers le Seigneur.
En héritant de la grande propriété paternelle, Pantoléon affranchit aussitôt les esclaves, hommes et femmes, en les rétribuant généreusement. Par la suite, il distribua ses biens aux nécessiteux: malheureux, pauvres, veuves et orphelins. Il se mit à visiter tous ceux qui souffraient, enchaînés dans les prisons, les consolant par des soins médicaux et des aumônes correspondant à leurs besoins. Il était donc ainsi, non seulement le médecin des maladies de la chair, mais aussi celui de la pauvreté humaine, car il distribuait des aumônes abondantes. Les pauvres s'enrichissaient par sa générosité, et la grâce de Dieu le secondait pour les guérisons. Il avait en effet reçu d'en-haut le don de la guérison et il guérissait gratuitement toutes les maladies, non par des médicaments, mais en invoquant le Nom de Jésus-Christ.
C'est comme cela que Pantoléon se montra en vérité Pantéléimon, c'est-à-dire le tout miséricordieux par le nom et par les actes, manifestant à tous sa compassion, et ne laissant partir personne sans une aumône ou une consolation.
Tous les malades de la ville s'adressaient à lui, abandonnant tous les autres médecins, qui étaient incapables d'apporter des guérisons aussi promptes et radicales. Il guérissait toujours avec succès et n'acceptait d'argent de personne. Le nom de ce médecin tout miséricordieux était connu de tout le peuple et les autres médecins étaient mal jugés et ridiculisés. Une grande jalousie doublée d'une tout aussi grande animosité envers Pantéléimon naquit ainsi chez les médecins de la ville, et ceci dès le jour de la guérison de l'aveugle.
Un jour, alors que cet aveugle marchait dans la ville, les médecins l'aperçurent et se demandèrent: « N'est-ce pas celui qui était aveugle, qui s'est adressé à nous pour que nous le guérissions et que nous n'avons pas pu guérir ? Comment se fait-il qu'il voie à présent ? Comment donc a-t-il été guéri et qui lui a ouvert les yeux ? ». Ils s'adressèrent alors à lui directement et lui posèrent toutes ces questions. L'aveugle répondit sans détour que son médecin était Pantéléimon. Et eux, sachant qu'il était l'élève d'Euphrosyne, ajoutèrent: « C'est le grand élève d'un grand maître! ». Ils ignoraient que Pantéléimon agissait par la force du Christ, et, sans s'en douter, ils confessaient en vérité que Pantéléimon était le grand élève d'un grand Maître, Jésus-Christ. Cependant, bien que leur bouche louât hypocritement le saint, leur coeur complotait le mal par envie, cherchant une accusation qui pût conduire le saint à sa perte.
Observant qu'il se rendaient dans les prisons pour y panser les plaies des captifs chrétiens qui souffraient pour le Christ, ils s'adressèrent à l'empereur tortionnaire Maximien en ces termes: « Empereur ! Ce jeune homme auquel tu as ordonné de s'instruire dans l'art de guérir afin de le garder auprès de toi dans ton palais, et bien il fait maintenant le tour des prisons, dédaignant la bonté dont tu fis preuve à son égard, il soigne les captifs qui blasphèment nos dieux et partage leurs idées, et en détourne beaucoup par son raisonnement dépravé. Si tu ne le fais pas périr rapidement, tu t'occasionneras un grand nombre de soucis, car beaucoup se détourneront de nos dieux à cause de son enseignement. En effet, Pantoléon n'attribue pas les guérisons qu'il opère à Esculape ou à un autre dieu, mais à un certain Christ, et ainsi tous ceux qui sont guéris croient en Lui ».
C'est avec de telles calomnies qu'ils s'adressèrent à l'empereur. Ils le supplièrent de faire quérir l'aveugle que Pantoléon avait guéri pour attester leurs dires. L'empereur ordonna sur le champ de rechercher cet aveugle et, lorsqu'il l'eut devant lui, il lui demanda:
-Dis-moi, homme, comment Pantoléon a-t-il guéri tes yeux ?
-Il a invoqué le Nom du Christ, puis il a touché mes yeux, et aussitôt, j'ai recouvré la vue.
-Et toi, qu'en penses-tu, est-ce le Christ qui t'a guéri ou bien les dieux ?
-Empereur, ces médecins que tu vois devant toi ont perdu beaucoup de temps à mon chevet. Ils m'ont pris tout mon pécule et, non seulement ils ne m'ont fait aucun bien, mais ils m'ont rendu complètement aveugle; en revanche, Pantoléon m'a rendu la vue par la seule invocation du Nom de Jésus-Christ. A présent, Ô Empereur, raisonne de toi-même ! Décide qui est le meilleur et le vrai médecin, Esculape, ou les autres dieux, ou bien le Christ qui m'a accordé la guérison, alors qu'Il n'avait été invoqué qu'une seule fois par Pantoléon !
Ne sachant que répondre à cela, l'empereur, comme tous les bourreaux, tenta de l'inciter à l'impiété.
-Ne sois pas insensé, homme, et ne mentionne pas le Christ, car il est évident que ce sont les dieux qui t'ont donné la possibilité de voir la lumière !
Sans prêter attention au pouvoir de l'empereur et sans craindre les menaces du bourreau, le miraculé répondit à Maximien beaucoup plus hardiment que l'aveugle de l'Evangile devant l'interrogatoire des pharisiens (Jn.9,27) : « Tu es insensé toi-même, Ô Empereur, d’attribuer à ces dieux aveugles le pouvoir de rendre la vue, et tu es aveugle toi-même en ne voulant pas voir la vérité ! ».
Gagné par la colère, l'empereur ordonna de le faire périr immédiatement par l'épée. La tête du bon confesseur du Nom de Jésus-Christ fut tranchée, et il partit voir face à face, dans la lumière céleste et sans déclin, Celui qu'il avait confessé sur la terre, après avoir recouvré l’usage de ses yeux de chair. Pantoléon racheta son corps et l'enterra auprès de son père.
A la suite de cela, l'empereur ordonna de faire venir Pantoléon. Alors que les soldats le conduisaient au palais, il chantait les paroles du psaume de David: « Ô Dieu, ne garde pas le silence quand je Te loue, car la bouche du pécheur et la bouche du fourbe sont ouvertes contre moi » (Ps.108,1), et la suite du psaume. Il se présentait ainsi par le corps devant le roi terrestre et par l'esprit devant le Roi Céleste. L’observant sans aucune colère, Maximien l'exhorta avec douceur:
- Ce ne sont pas des bonnes choses que j'entends à ton sujet, Pantoléon. On me dit que tu blâmes Esculape et les autres dieux, et que tu les ridiculises. Et le Christ qui a péri de méchante mort, tu Le glorifies, tu n'espères qu'en Lui, tu Le reconnais Lui seul comme Dieu. Il me semble que tu n'ignores pas quelle grande attention je te porte et quelle grande bonté je t'ai manifestée en te recevant dans mon palais et en ordonnant à ton maître Euphrosyne de t'enseigner rapidement l'art de la médecine, pour que tu puisses rester en permanence à mes côtés. Et toi, dédaignant tout cela, tu t'es tourné vers mes ennemis. Toutefois, je ne veux pas croire ce que l'on me dit de toi, car les gens ont pris l'habitude de dire beaucoup de mensonges. Voici donc pourquoi je t'ai appelé: j'attends de toi que tu racontes toi-même la vérité à ton sujet, que tu réfutes en présence de tous les calomnies mensongères de ceux qui te jalousent, et que tu offres, comme il convient, un grand sacrifice aux dieux.
-Il faut croire les actes plus que les paroles, Ô, Empereur ! La vérité apparaît bien mieux à travers les oeuvres qu'à travers les mots. Ainsi, je renie Esculape et les autres dieux au profit du Christ que je glorifie, car c'est par Ses actes que j'ai su qu'Il est le seul vrai Dieu. Ecoute donc quelles sont brièvement les oeuvres du Christ: c'est Lui qui a créé le ciel et affermi la terre, ressuscité les morts, rendu la vue aux aveugles, purifié les lépreux, relevé les paralytiques de leur couche d'une seule parole. Est-ce que les dieux que vous vénérez ont accompli quoi que ce soit de semblable ? Et d'ailleurs peuvent-ils le faire ? Si à présent tu veux connaître la force toute-puissante du Christ, tu peux en voir la manifestation sans délai: ordonne qu'on apporte ici-même un malade à l'agonie sur sa couche, un malade pour lequel les médecins ont perdu tout espoir. Que vos sacrificateurs viennent, qu'ils invoquent leurs dieux, et moi, de mon côté, j'invoquerai le mien. Que Celui qui guérira le malade soit déclaré le seul vrai Dieu !
Cette suggestion plut à l'empereur qui envoya sur le champ chercher un tel malade. On apporta sur son grabat un homme paralysé depuis de nombreuses années, qui ne pouvait bouger aucun membre et ressemblait à du bois inanimé. Les sacrificateurs vinrent également, particulièrement les experts en soins médicaux. Ils proposèrent au saint d'invoquer le Christ en premier, mais celui-ci répondit: « Si j'invoque mon Dieu, et s'Il guérit le paralytique, qu'est-ce qui restera à faire à vos dieux ? Invoquez donc vos dieux en premier, et s'ils guérissent le malade, il n'y aura pas lieu d'invoquer mon Dieu ».
Les sacrificateurs commencèrent donc à invoquer leurs dieux, l'un Esculape, l'autre Zeus ou Diane, ou d'autres démons encore, mais ni parole, ni attention ne se manifesta de leur part, bien qu'on eût longtemps persisté dans les prières désagréables au seul vrai Dieu. Voyant ces vaines tentatives, le saint se mit à rire. L'empereur s'adressa alors à Pantéléimon: « Si tu le peux, Pantoléon, guéris cet homme par l'invocation de ton Dieu ».
« Que s'éloignent les sacrificateurs ! », dit le saint, et ceux-ci s'éloignèrent.
Alors, s'approchant du lit, le saint leva les yeux vers le ciel et prononça la prière suivante: « Seigneur, exauce ma prière et que mon cri parvienne jusqu'à Toi. Ne détourne pas de moi Ta face. Au jour où la tribulation me saisit, incline vers moi Ton oreille; au jour où je T'invoque, hâte-Toi de m'exaucer (Ps.101, 1,3); manifeste Ta force toute puissante devant ceux qui ne Te connaissent pas, car pour Toi, tout est possible, Ô, Roi des Puissances ! ». Après avoir dit ces mots, Pantéléimon prit le paralytique par la main en disant: « Au Nom du Seigneur Jésus-Christ, lève-toi et sois guéri ! ». Le malade se leva sur le champ, sentit la vigueur affermir tout son corps et se réjouit de pouvoir marcher. Il prit son grabat, et le porta dans sa maison.
A la vue d'un tel miracle, nombreux furent ceux qui crurent au Christ dans l'assistance. Les sacrificateurs idolâtres grincèrent des dents contre le serviteur de Dieu et s'adressèrent à l'empereur en disant: « Fais le périr, Ô, empereur, et le plus vite possible ! ». Maximien dit alors à Pantoléon: « Apporte un sacrifice aux dieux, Pantoléon, pour ne pas périr inutilement, car tu sais combien d'hommes ont déjà péri pour avoir renié nos dieux, ou pour avoir désobéi à nos ordres. Tu n'ignores pas avec quelle cruauté fut torturé le vieillard Anthyme! ». Ce à quoi le saint répondit: « Tous ceux qui sont morts pour le Christ n'ont pas péri mais ont trouvé la vie éternelle. Si Anthyme qui était âgé et faible a pu supporter de cruelles souffrances pour notre Seigneur, moi qui suis jeune et vigoureux, je dois pouvoir sans crainte faire face aux supplices auxquels tu me condamneras; la vie pour moi sera dénuée de sens si je ne meure pas pour le Christ, et si je meurs, cette mort sera un gain ».
L'empereur fit pendre le martyr nu à l'arbre de tortures, et commanda qu'on écorchât son corps avec des griffes de fer en lui brûlant les flancs avec des bougies allumées. Mais il supporta ces souffrances en disant, les yeux tournés vers le ciel; « Seigneur Jésus-Christ ! Apparais-moi en cet instant, et donne-moi la patience nécessaire pour que je puisse supporter tout cela jusqu'au bout ! ». Le Seigneur lui apparut sous l'apparence du presbytre Hermolaüs en disant; « Ne crains pas, Je suis avec toi ! ». A l'instant même les bras des bourreaux s'affaiblirent et s'engourdirent, de sorte que les instruments de torture tombèrent et que les bougies s'éteignirent. Voyant cela, l'empereur ordonna qu'on enlevât le martyr de l'arbre de tortures, et il lui demanda:
-D'où provient la force de ta magie, pour que les serviteurs s'affaiblissent et que les bougies s'éteignent ? .
-Ma magie, c'est le Christ tout-puissant dont la force accomplit tout .
-Et que ferais-tu si je décidais des souffrances encore plus grandes ?
-Si les souffrances augmentent, mon Christ m'enverra une patience plus grande encore pour te couvrir de honte. Et moi, en supportant pour Lui des souffrances plus pénibles, je recevrai de Lui une plus grande rétribution.
Alors le bourreau ordonna de faire fondre de l'étain dans un grand chaudron et d'y jeter le martyr. Lorsque l'étain se mit à bouillir, Pantéléimon fut conduit près du chaudron. Il leva les yeux vers le ciel et dit: « Exauce ma prière Seigneur, quand je Te supplie; de la crainte de l'ennemi délivre mon âme. Protège-moi contre les complots des méchants, contre la multitude de ceux qui commettent l'injustice »(Ps.63,2-3). Alors qu'il priait ainsi, le Seigneur lui apparut à nouveau sous l'aspect d'Hermolaüs et, l'ayant pris par la main, entra avec lui dans le chaudron. Le feu s'éteignit aussitôt et l'étain se refroidit. Le martyr entonna alors les paroles du psaume: « Pour moi, j'ai crié vers Dieu et le Seigneur m'a exaucé. Le soir, le matin et à midi, j'en ferai le récit, j'en publierai la nouvelle et Il exaucera ma demande » (Ps.54,17-18). Les personnes présentes s'étonnèrent du miracle et l'empereur s'exclama: « Qu'adviendra-t-il si le feu même s'éteint et si l'étain se refroidit ? A quel supplice livrerai-je ce sorcier ? ». On lui donna alors le conseil suivant: « Qu'on le jette dans les profondeurs de la mer et il périra instantanément, car il ne pourra pas ensorceler la mer entière ». Et c'est ce que le bourreau ordonna.
Les serviteurs s'emparèrent du martyr, le conduisirent sur le littoral, le mirent dans un bateau et lui attachèrent une grosse pierre au cou. S'étant éloignés de la côte, ils le jetèrent à la mer et regagnèrent le rivage. Lorsqu'il se retrouva dans les flots, Pantéléimon vit le Christ lui apparaître à nouveau sous les traits d'Hermolaüs, comme la première fois. La pierre qu'il portait attachée à son cou devint légère comme une feuille, de sorte qu'il s'en servit comme d'une planche pour regagner la rive, marchant à la surface de l'eau comme jadis l'Apôtre Pierre, guidé par la main droite du Christ. Il accosta en chantant et louant Dieu, puis se rendit devant l'empereur qui, stupéfait d'un tel miracle, s'écria:
-Quelle est la puissance de ta sorcellerie, Pantoléon, pour que la mer te soit soumise ?
-La mer est également soumise à mon Maître et accomplit Sa volonté !
-Alors, tu possèdes aussi la mer ?
-Pas moi, mais mon Christ, Créateur et Maître de toutes les choses visibles et invisibles. Il possède le ciel et la terre, et même la mer où Son chemin et Ses sentiers sont tracés dans les grandes eaux (Ps.76,20).
Sur quoi, le bourreau ordonna d'apprêter le cirque en dehors de la ville, pour y livrer le martyr aux bêtes. La ville entière se rassembla pour le spectacle, désireuse de voir comment un si beau et innocent jeune homme serait dévoré par les fauves. L'empereur vint aussi; il conduisit le jeune homme au lieu de son supplice et lui désigna les bêtes du doigt en disant: « Elles ont été préparées pour toi: écoute-moi et ménage ta jeunesse; aie pitié de la beauté de ton corps. Sacrifie aux dieux, sinon tu mourras d'une mort cruelle, déchiqueté par les crocs des fauves ». Mais le saint préféra les crocs à une suggestion aussi maligne. On le livra donc aux fauves. Le Seigneur apparut à nouveau au saint sous les traits d'Hermolaüs, ferma les gueules des animaux et les rendit doux comme des brebis, à tel point qu'ils s'approchèrent de Pantéléimon en rampant pour lui lécher les pieds. Il les caressa un par un, et chacun écartait son voisin pour pouvoir approcher le martyr. Le peuple fut très surpris en voyant cela et beaucoup s'écrièrent: « Grand est le Dieu des chrétiens ! Que ce jeune homme juste et innocent soit libéré ! ». L'empereur fut pris d'une grande colère et il envoya ses soldats l'arme à la main contre la foule de ceux qui avaient glorifié le Christ Dieu et les fit massacrer. Il ordonna aussi de tuer les animaux. Voyant cela, le martyr exulta en disant: « Gloire à Toi, Christ Dieu, parce que non seulement les hommes, mais les animaux aussi meurent pour Toi! ».
L'empereur quitta le cirque affligé et courroucé, et fit jeter le martyr en prison. Les victimes de la tuerie furent ensevelis par leurs proches, et on abandonna les animaux aux chiens et aux oiseaux. Mais un autre grand miracle eut lieu: les cadavres des bêtes restèrent sur place de nombreux jours sans être touchés, et, de surcroît, ils ne sentaient pas. Ayant appris cela, l'empereur les fit jeter dans un grand ravin et recouvrir de terre. Il fit préparer pour le martyr une grande roue couverte de piquants acérés à laquelle on l’attacha: dès que la roue se mit à tourner, elle vola immédiatement en éclats sous l'effet d'une force invisible, tuant plusieurs personnes qui se trouvaient à proximité. Le martyr en descendit sans aucun dommage. La peur s'empara de tous, à la vue de ces prodiges qui glorifiaient Dieu à travers Son saint. L'empereur fut très surpris:
-Qui t'a enseigné de tels actes de sorcellerie?
-Ce n'est pas de la sorcellerie mais la vraie piété chrétienne, qui m'a été enseignée par un saint homme du nom d'Hermolaüs.
-Et où se trouve ton maître Hermolaüs ? Nous voulons le voir !
Le Saint comprit en esprit que la couronne du martyre était prête pour Hermolaüs.
-Si tu l'ordonnes, je le conduirai chez toi !
C'est ainsi qu'accompagné de trois soldats, Pantéléimon fut libéré pour aller chercher le presbytre .
-Pourquoi es-tu venu, mon fils ?
-Maître et père, l'empereur t'appelle.
-Tu es venu à l'heure me chercher, le moment de ma souffrance et de ma mort est arrivé. Cette nuit même, le Seigneur m'est apparu pour me dire: « Hermolaüs, tu auras beaucoup à souffrir pour Moi, à l'instar de Mon serviteur Pantéléimon ! ».
Après avoir prononcé ces paroles, le vieillard suivit avec joie le martyr et se présenta devant l'empereur. Celui-ci, en voyant le presbytre, lui demanda son nom. Répondant à l'empereur, Hermolaüs ne cacha pas qu'il était chrétien. Le souverain voulut ensuite savoir s'il se trouvait encore quelqu'un partageant cette foi. Le vieillard répondit qu'il avait deux compagnons, vrais serviteurs du Christ, nommés Hermippe et Hermocrate. L'empereur ordonna alors d'aller les chercher et, quand il eut les trois serviteurs du Christ devant lui, il leur dit:
-C'est vous qui avez détourné Pantoléon de nos dieux ?
-C'est le Christ notre Dieu Lui-même qui appelle à Lui ceux qu'Il estime dignes, les faisant sortir des ténèbres de l'idolâtrie vers la lumière de la connaissance.
-Abandonnez à présent vos paroles mensongères et convertissez à nouveau Pantoléon aux dieux. Votre première faute sera alors pardonnée, et vous obtiendrez de moi l’honneur de devenir mes amis les plus proches.
-Comment pourrions-nous faire cela, alors que nous sommes prêts à mourir avec lui pour le Christ notre Dieu ? Ni nous, ni lui ne reniera le Christ, ni pire encore, n'apportera de sacrifice aux idoles sourdes et inanimées.
Ils tournèrent à ce moment leurs pensées vers Dieu et se mirent à prier en levant les yeux vers le ciel. Le Sauveur leur apparut d'en haut, et aussitôt la terre se mit à trembler en secouant toute la région.
-Vous voyez comme les dieux sont irrités contre vous, ils font vaciller la terre.
-Tu as dit la vérité: la terre a vacillé au moment où vos dieux se sont brisés par la puissance de notre Dieu qui s'est irrité contre vous.
Alors qu'ils parlaient encore, un messager accourait du temple pour annoncer que toutes les idoles étaient tombées par terre et s'étaient brisées en petits morceaux. Refusant de voir en cela la force de Dieu, mais plutôt une sorte de sorcellerie des chrétiens, le souverain s'écria: « En vérité, si nous ne faisons par périr ces mages au plus vite, toute la ville périra à cause d'eux ».
L'empereur ordonna de jeter Pantéléimon en prison, et fit conduire Hermolaüs et ses deux compagnons à la torture, à la suite de quoi il les fit décapiter. C'est ainsi que les trois saints martyrs, Hermolaüs le presbytre, et ses compagnons Hermippe et Hermocrate, se présentèrent ensemble dans la gloire céleste, devant la Sainte Trinité.
Après le meurtre des trois saints martyrs, l'empereur fit à nouveau comparaître Pantéléimon devant lui:
-J'ai converti de nombreux disciples du Christ à nos dieux; tu es le seul à refuser de m'obéir. Ton maître Hermolaüs et ses deux amis ont déjà adoré les dieux et leur ont offert un sacrifice. Je les ai honorés d'une fonction importante au palais. Agis donc de même pour recevoir le même honneur qu'eux !
Pantéléimon savait dans son coeur que les saints étaient morts.
-Ordonne leur de venir ici que je les vois devant toi !
-Ils ne sont pas là en ce moment car je les ai envoyés dans une autre ville recevoir une grande richesse.
-Voilà que tu as dit involontairement la vérité: tu les a renvoyés d'ici après les avoir mis à mort, et ils sont effectivement partis dans la cité céleste du Christ, où ils reçoivent les richesses qu'il est impossible à l'oeil de voir.
L'empereur comprit qu'il serait impossible d'inciter le saint à l'impiété; il ordonna de le battre avec cruauté et, à la suite de cela, il le condamna à être décapité. Son corps devait ensuite être brûlé. Les soldats s'emparèrent de lui et le conduisirent à l'extérieur de la ville pour le décapiter. Allant à la mort, le saint chantait le psaume de David: « Ils m'ont souvent combattu depuis ma jeunesse, mais ils n'ont rien pu contre moi...les pécheurs ont tramé leurs embûches » (Ps.128).
Lorsque les soldats se furent écartés d'un mille de la ville, ils atteignirent le lieu que le Seigneur avait choisi pour la mort de son serviteur. Ils attachèrent Pantéléimon à un olivier. Le bourreau s'approcha et frappa sa victime au cou avec son épée, mais le fer plia comme de la cire. Le saint n'ayant pas terminé sa prière, le coup se devait de rester sans effet. Les soldats furent saisis d'effroi et ils s'écrièrent: « Grand est le Dieu des chrétiens ! ». Ils tombèrent aux pieds du saint et dirent: « Serviteur de Dieu ! Nous te prions d'intercéder pour nous pour que nous soient pardonnés les péchés que nous avons commis sur l'ordre de l'empereur ! ».
Comme le saint priait, une voix se fit entendre du ciel, qui s'adressait à lui en confirmant son changement de nom: en effet, elle l'appela clairement Pantéléimon au lieu de Pantoléon, faisant connaître la grâce qui lui était accordée de pardonner à tous ceux qui auraient recours à lui dans les peines et les malheurs. Le Seigneur l'appela également à Le rejoindre au ciel. Rempli de joie, le saint ordonna aux soldats de le décapiter, mais ceux-ci, tremblant de peur, refusèrent de l'exécuter. Le saint les y encouragea en disant: « Si vous ne voulez pas accomplir la tâche qui vous est confiée, vous ne recevrez aucune miséricorde de mon Christ! ». Alors les soldats s'approchèrent et embrassèrent son corps. Puis l'un d'eux s'avança pour trancher la tête du martyr. Du lait coula à la place du sang. L'olivier auquel il était attaché se couvrit aussitôt de fruits de la racine jusqu'à la cime. Devant ce spectacle, nombreux furent ceux qui crurent au Christ.
Dès qu'il fut informé de ces événements miraculeux, l'empereur ordonna de couper l'olivier en petits morceaux et de le brûler avec le corps du martyr. Lorsque le feu s'éteignit, les croyants sortirent des cendres le corps intact du saint et l'enterrèrent avec de grands honneurs sur les terres voisines du philosophe Adamante.
Laurent, Bassa et Probus, qui servaient dans la maison du martyr, suivirent à distance tous ces événements; ils furent témoins de toutes les souffrances et entendirent la voix venue du ciel. Ils écrivirent le récit de la vie et des souffrances de saint Pantéléimon, et le remirent aux saintes églises en souvenir du martyr, pour l'édification des lecteurs, à la gloire de notre Seigneur Jésus-Christ, glorifié avec le Père et l'Esprit Saint, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen.

(Saint Pantéléimon fut décapité le 27 juillet 305.) Il est fêté le 27 Juillet.

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